Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/AUTRUI

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 671).
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☞ AUTRUI. s. m. Sans pluriel, ou pronom indéfini, sans genre ni nombre, qui signifie les autres personnes. Il ne s’applique jamais qu’aux personnes, & il est plus général que autre.

☞ Quelques-uns regardent ce mot comme vieux, & disent toujours autres pour autrui. Mais ce n’est pas parler françois que de dire autres, en beaucoup d’endroits, où il faut dire autrui. Par exemple, il ne faut pas désirer le bien des autres, est très-mal dit, il faut dire le bien d’autrui. Autre a relation aux personnes dont on a déjà parlé. Comme si je disois, il ne faut pas ravir le bien des uns, pour le donner aux autres, je dirois bien ; mais je parlerois très-mal en disant pour le donner à autrui. Parce que quand il y a relation de personnes, il faut dire autres, & quand il n’y en a point, il faut dire autrui. D’ailleurs, autre s’applique aux personnes & aux choses ; mais autrui ne se dit que des personnes, & toujours avec une préposition dont il est le complément. Envier le bien d’autrui. Ne fais à autrui que ce que tu voudrois qui te fût fait à toi-même. Être logé chez autrui. Vous autres galans, vous jugez d’autrui par vous-mêmes. Scarr.

Un cœur noble est content de ce qu’il trouve en lui,
Et ne s’applaudit point des qualités d’autrui.
Ce n’est que l’air d’autrui qui peut déplaire en moi.

Boil.
.

Cependant qu’il tente lui-même
Ce qu’il peut faire par autrui. Malherbe.

C’est-à-dire, par tout autre que lui.

☞ Dans les Lettres de Chancellerie on met toujours cette clause, sauf en autres choses notre droit, & l’autrui en toutes. Dans cette phrase l’autrui signifie par ellipse, le droit d’autrui.

Ménage dérive ce mot du génitif alterius, en transposant les lettres, dont les Italiens ont fait aussi altrui.

On dit proverbialement, le mal d’autrui n’est que songe ; pour dire, ne nous touche guère. Qui s’attend à l’écuelle d’autrui, souvent dine mal. On dit aussi, le bien d’autrui n’est pas à nous.