Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/ARDENT

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 483).
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☞ ARDENT, ENTE. adj. Qui est en feu, pénétré par le feu. Ardens. Fournaise ardente. Brasier ardent. Fer ardent. La torche ardente à la main.

Ardent, signifie aussi, qui brûle. On dit en ce sens que le soleil est ardent, qu’il fait une chaleur ardente. Miroir ardent.

☞ Ce mot vient de l’ancien verbe arder qui n’est plus en usage.

Chaud, Brûlant, Ardent, Enflammé, Embrasé dans une signification synonyme. Un objet est dit chaud, tant qu’on en peut supporter le toucher sans douleur : brûlant, quand on ne peut plus le toucher sans ressentir de la douleur : ardent, lorsqu’il est en feu, & que les parties ignées dont il est pénétré se font sentir au-dehors : enflammé, lorsque le feu dont il est pénétré s’est rendu sensible aux yeux au-delà de sa surface : embrasé, lorsque le feu a cessé de s’élancer au-delà de sa surface, & qu’il en paroît seulement pénétré dans toute sa substance.

Chapelle ardente. On appelle ainsi certaines chapelles où l’on brûle de l’huile ou de la cire. Plus communément, c’est le luminaire nombreux qui brûle autour du cercueil ou de la représentation d’un corps mort.

Fièvre ardente, en Médecine, febris ardens. Fièvre très-vive & brûlante.

Miroir Ardent, c’est un miroir concave, sphérique, ou parabolique, qui ramasse tous les rayons du soleil en un point, qu’on appelle sujet, où la chaleur devient si grande, qu’elle brûle. Speculum quod adversum soliis radiis accenditur. On a vu de si bons miroirs ardens, qu’ils fondoient & calcinoient les métaux en deux minutes. Voyez Miroir.

Ardent, se dit figurément en Morale, de tout ce qui se fait avec chaleur, avec passion, avec véhémence. Ardens, fervens, acer. Une dévotion ardente. Un zèle ardent. L’amour des gens qui font profession de la sagesse, est d’autant plus ardent, qu’il ne se dissipe par aucunes marques extérieures. Vill. Dispute ardente. Soif ardente.

Combien de fois, sensible à tes ardens désirs,
M’est-il en ta présence échappé de soupirs ?

Ardent, appliqué aux personnes, désigne celui qui se porte avec chaleur & véhémence à quelque chose. On dit qu’un homme est ardent à la chasse, à l’étude, au combat, à la dispute. C’est un homme ardent & âpre au gain. Lucri cupidine fervens.

☞ On le dit aussi des hommes & des animaux pour désigner une très-grande activité. On dit qu’un homme est extrêmement ardent. Valentinien étoit naturellement ardent, & alloit à ses fins sans beaucoup de ménagement Fléch. Un cheval trop ardent. Un chien trop ardent.

☞ En fait de littérature, il annonce une très-grande vivacité. Le style de l’Historien doit être moins ardent, & plus tempéré que celui de l’Orateur. Vall.

Ardent, en parlant des couleurs, signifie la couleur rousse. Rusus, poil ardent. Ce cheval a le poil ardent, c’est-à-dire roux, tirant sur la couleur de feu. En termes de Marine, on dit qu’un vaisseau est ardent, lorsqu’il approche aisément du vent, lorsqu’il se range au vent malgré les voiles d’avant & son gouvernail, & qu’il a beaucoup de disposition à venir au vent. Navis quæ naturâ fuâ vento fit proxima.

Ardent, en termes de Blason, se dit d’un charbon, d’un flambeau allumé. Candens, accensus.

Chambre ardente. Voyez Chambre.

☞ En termes de Chimie, on appelle esprits ardens, ceux qui étant tirés, par la distillation d’un végétal fermenté, peuvent prendre feu & brûler. Tels sont l’esprit de vin, l’eau-de-vie.

ARDENT, s. m. Est un certain météore, ou feu-follet, formé de quelques exhalaisons grasses, qui s’élèvent & s’enflamment dans les lieux marécageux. Ignes nocte errantes. Les paysans disent que ce sont des enfans mort-nés, ou de faux boumoyeurs, & en conçoivent des terreurs paniques & ridicules. On les appelle en divers lieux, Fuyrolles, Flammerolles, Flambarts ou Follets. Les Anciens, quand ils en voyoient deux ensemble, les appeloient Castor & Pollux, & ils les tenoient pour un heureux présage. Quand il n’en paroissoit qu’un, ils le nommoient Hélène, & le présage en étoit funeste, selon le témoignage de Pline.

On appelle aussi ardens, certains malades d’une fièvre ardente, qu’on nomme aussi Feu-sacré. C’étoit une espèce d’érésipèle, ☞ accompagné d’une fièvre qui les brûloit. C’est de-là qu’est venu le titre de Sainte Geneviève des ardens, parce que ce fut, dit-on, par l’intercession de cette Sainte, que cessa cette maladie qui avoit fait de si grands ravages vers l’an 1130. La même maladie épidémique, ou une toute semblable, courut encore en France l’an 1374, & fut nommé le mal des Ardens.