Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/ARC

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 465-467).

ARC. s. m. Arme courbée en demi-cercle, servant à tirer des flèches. Arme faite d’un morceau de bois, de corne, ou d’autre matière qui fait ressort, lequel étant courbé fortement par le moyen d’une corde attachée à ses bouts, fait partir une flèche avec grand effort en se remettant en son état naturel, ou du moins en se redressant avec violence. Arcus. Le mot d’arc est dit ab arcendo, quòd arceat hostes, parce qu’il écarte les ennemis. Les cornes d’un arc, sont ses extrémités où la corde est attachée pour le bander. Cornua. L’arc est la première & la plus générale de toutes les armes : car on a trouvé que les peuples les plus barbares, les plus éloignés, & qui avoient le moins de communication avec les autres hommes, s’en servoient. On s’en sert encore dans plusieurs endroits de l’Asie, de l’Afrique & de l’Amérique. Bander, débander un arc. Tirer de l’arc. Les anciens attribuoient l’invention de l’arc & de la flèche à Appollon.

Chez les Mogols, l’arc est le symbole de la royauté, & la flèche le symbole de l’ambassadeur, ou d’un Vice-Roi. D’Herb. C’est Louis XI qui commença, en 1481, à abolir en France l’usage de l’arc & de la flèche, pour introduire les armes des Suisses, c’est-à-dire, la hallebarde, la pique, & les larges épées.

On dit, un arc d’ivoire, d’ébène, &c. Arcus ebore, ebeno instructus ; pour dire, un arc garni d’ébène, d’ivoire ; car on ne fait point d’arc d’ivoire, d’ébène, ni de bois durs, à cause qu’ils ne font point de ressort.

L’arc a fourni plusieurs devises. Voici les mots : mi riposo no es flaqueza, mot espagnol, qui signifie, mon repos n’est point langueur. Stringendo mi scioglio, mot italien, qui veut dire, en serrant mes liens je me délie, je me mets en plus grande liberté. Piegato si lega, autre mot italien de Lucarini, il se lie quand il est plié. Et Per ferir altrui terse se stesso, pour frapper un autre il se courbe, il se gêne.

Arc-a-Jalet. Sorte de petite arbalète propre à jeter de petite balles. Arcus scapo instructus & emittendis globulis comparatus.

Arc, signifie en Géométrie, un trait de compas qui se meut sur un centre, & qui n’achève pas un demi cercle ; ou une partie de la circonférence d’un cercle, moindre que la moitié. La base ou la ligne qui en joint les deux extrémités s’appelle la corde, & la perpendiculaire élevée au milieu de cette ligne, s’appelle la flèche. Tous les angles sont mesurés par des arcs. Pour savoir leur grandeur, il faut décrire un arc, dont le centre soit en leur pointe.

On appelle aussi arc en Astronomie, une portion d’un cercle, qui fait partie d’un cercle divisé en 360 parties : & on dit, un arc de 60, de 90, & de 120 degrés. L’arc diurne du soleil est le cercle parallèle à l’équateur, que le soleil décrit sur l’horizon ; c’est-à-dire, depuis son lever jusqu’à son coucher. Son arc nocturne est un pareil cercle qu’il décrit sous l’horizon. L’élévation du pôle se mesure par un arc pris sur le méridien. L’arc de progression, ou de direction, est l’arc du zodiaque, que la planète semble parcourir lorsque son mouvement se fait selon la suite des signes. L’arc de rétrogradation, est l’arc du zodiaque que la planète parcourt en rétrogradant, & lorsqu’elle se meut, contre l’ordre des signes. L’arc de station première, est l’arc que la planète parcourt dans le premier demi-cercle de son épicycle, pendant qu’elle est stationnaire. L’arc de station seconde, est l’arc que la planète parcourt dans l’autre demi-cercle de son épicycle, pendant qu’elle paroît stationnaire. Dans les Mémoires de l’Académie des Sciences 1710, p. 200. M. de la Hire donne une méthode générale pour la division des arcs de cercle, ou des angles en autant de parties égales que l’on voudra.

Arc, se dit aussi généralement de toutes les choses qui se font en ligne courbe. En cet endroit le rivage se courbe en arc pour former un golfe, ou une anse. Cette rivière, ce chemin, la muraille de ce port, se forment en arc, & font un grand détour.

Arc, se dit aussi dans les bâtimens, des voûtes & trompes courbées en rond. Arc en plein cintre, est celui qui forme un demi-cercle parfait. Arcus integer. Arc en anse de panier, est un arc surbaissé. Arcus diminutus, delumbatus. Arc en talus, est un arc percé en talus dans un mur. Arcus subcuneatus. Arc biais, ou de côté, est un arc dont les piédroits ne sont pas d’équerre. Arcus compositus. Arc en décharge, est un arc fait pour soulager une platebande, ou un poitrail, & dont les retombées portent sur les sommiers. Arcus epistylia sustinens. Arc rampant, est un arc incliné dans un mur à plomb. Arcus incidens muro ad perpendiculum erecto. On appelle arcs, ou arceaux, les voûtes des portes ou des fenêtres qui ne sont pas carrées. Cette voûte fait un trop grand arc. Il faut bander des arcs, quand on fait des fondemens dans une carrière vidée, pour soutenir les constructions qu’on fait dessus. Blondel enseigne le moyen de trouver les joints de toutes sortes d’arcs rampans : ce qui est inséré dans les Mémoires de l’Académie des Sciences.

Arc de triomphe, ou triomphal. C’est une construction de charpente qu’on fait sur quelques portes, ou passages, avec divers ornemens dans les entrées d’un Roi, ou d’un vainqueur. Arcus triumphalis. On en fait aussi de pierre magnifiquement décorés d’architecture ou de sculpture, pour conserver la mémoire des grandes actions à la postérité, par plusieurs inscriptions & bas-reliefs qu’on y taille. L’arc de Constantin. L’arc du Roi, Louis XIV.

On appelle arc de carrosse, la pièce de fer courbée en arc qui joint la flèche ou les brancards au train de devant : ce qui donne au carrosse la facilité de tourner en plus petit espace.

Arc de l’Éperon. Terme de Marine. C’est en longueur la distance qu’il y a du bout de l’éperon à l’avant du vaisseau, par-dessus l’éperon.

On dit figurément en termes de l’Ecriture, que Dieu a bandé son arc, préparé son arc ; pour dire, qu’il menace les hommes dans sa colère.

Les Païens mettoient entre les mains de Cupidon un arc & des flèches, pour signifier figurément qu’il blessoit les cœurs en leur donnant de l’amour.

On appelle figurément les sourcils d’une belle brune, des arcs d’ébène.

On dit proverbialement & figurément, qu’il faut avoir plusieurs cordes à son arc ; pour dire, avoir plusieurs moyens de sortir d’une affaire, d’en venir à bout. Marot a dit proverbialement :

Débander l’arc ne guérit point la plaie.

☞ Pour dire, que quand on a fait un mal, on ne le répare pas en se mettant en état de n’en plus faire.

Ce proverbe vient de René d’Anjou, Roi de Sicile, qui après la mort d’Isabeau de Lorraine sa femme arrivée en 1453, pour montrer qu’il l’aimeroit toujours nonobstant sa mort, prit ce vers pour l’ame de sa devise, dont le corps étoit un arc à la turque qui avoit la corde rompue.

Arc des loyaux amans, étoit une fiction, dont il est fait mention dans l’Amadis, d’un arc ou d’une voûte qui étoit dans le palais enchanté d’Apollidon, où il paroissoit une grande statue de cuivre, tenant un cors en main, qui rendoit un son mélodieux quand les amans fidèles passoient par-dessous, & qui jettoit du feu & de la fumée avec un bruit effroyable quand ils étoient infidèles.

Arc-boutans. (on ne prononce point le c) Grandes arcades appuyées sur des murs solides, qu’on fait pour soutenir les voûtes élevées des églises, ou des autres bâtimens. Anterides, Erisinata. ☞ On dit mieux arc-butant. Ce mot est françois, & est formé d’arc & de buter. Encyc.

☞ On appelle quelquefois arc-boutant une masse de maçonnerie, un pilier, un éperon servant à contre-tenir un mur de terrasse ou autre. Mais le mot d’arc-boutant ne convient qu’à un corps qui s’élève & s’incline en portion de cercle contre le corps qu’il soutient.

On appelle aussi arc-boutans d’un carrosse, les pièces de fer qui sont des deux côtés des moutons pour les soutenir, parce qu’ils portent tout le faix du carrosse. La barre qui ferme les portes cochères s’appelle aussi arc-boutant, ou pied de biche.

Arc-boutans. s. m. Terme de Marine. Espèce de petits mats de 25 à 30 pieds de longueur, ferrés par le bout d’un fer à trois pointes, & long de 6 à 8 pouces. Ils servent à tenir les écoutes des bonnettes en état, ou à repousser un vaisseau s’il venoit à l’abordage.

On appelle figurément arc-boutant, appui, les principaux défenseurs d’un parti, d’une doctrine. Præsidia, propugnacula. Les Peres de l’Eglise ont été les arcs-boutans de la religion. Ce grand Capitaine est le principal arc-boutant, le meilleur appui de l’Etat. Ce factieux étoit l’arc-boutant de la ligue.

Va, Démon, va de Claude échauffer les transports,
Que ce ferme arc-boutant, cette plume zélée
Soutienne constamment la secte désolée.

Le Noble Teneliére.

Arc-bouter. v. a. (le c ne se prononce point ). appuyer un arc-boutant. Fulcice. Voy. Arc-boutant, Arc-bouter au mur.

☞ ARC-BOUTÉ, ÉE. Part.

Arc-rampant. C’est en Architecture une ligne courbe, dont les deux extrémités prises aux appuis de leurs naissances, qu’on appelle impostes, ne sont pas de niveau, & dont les diamètres conjugués ne sont pas à l’équerre, c’est-à-dire, dont l’aplomb de la clef est oblique à la ligne de rampe des impostes. Telles sont les arcades que l’on fait sous les rampes des escaliers & des terrasses en descente ; ce qui fait que ces sortes d’arcs ne peuvent jamais être d’une seule portion de cercle, mais de quelque autre section conique ou de spinale. Frézier.

Arc de cloître. Terme d’Architecture. Voûte composée de deux, trois, quatre ou plusieurs portions de berceaux, qui se rencontrent en angle rentrant dans leur concavité, ensorte que leurs côtés forment le contour de la voûte en polygone. Telles sont, par exemple, les petites voûtes, ou chapiteaux de guérites à pans. Si les berceaux cylindriques se rencontrent en angle rentrant sur leur convexité, ou ce qui est la même chose, en angle saillant sur la concavité, la voûte changeroit de nom, elle s’appeleroit voûte d’arrête. Id.

Arcs doubleaux. Terme d’Architecture. Transvoluti arcus. Dira-t-il que ces arcs doubleaux, peut-être de 40, 50 ou 60 pieds de diamètre, qui étoient déjà en voûte, pussent, en suivant la rondeur de la tour qu’ils portoient, & en se détournant ainsi de l’aplomb, soutenir un si prodigieux fardeau ? Cordem. L’arc doubleau est une arcade en saillie sur la doële d’une voûte, qu’elle traverse à angle droit, desorte qu’elle lui fait en cet endroit une espèce de doublière, soit pour la renforcer, soit pour cacher quelque arrête de rencontre, comme aux voûtes gothiques, ou pour faire une liaison d’un pilastre, ou d’une perche à son opposée. Frézier. Voyez encore Ogive, ou Augive.

Un arc droit en Architecture, est celui dont la corde est perpendiculaire au joint du lit d’une voûte, lorsque ce joint est droit, ou à sa tangente au point de rencontre, lorsqu’il est courbe ; c’est ainsi que l’entend le P. Deran, qui confond l’arc droit avec le biveau. Mais, pour mieux expliquer ce mot, l’arc droit proprement dit, est la section d’une voûte, perpendiculairement à son axe & à ses côtés, ou aux tangentes à ses côtés. D’où il suit, 1.o Qu’il n’y a point d’arc droit proprement dit aux voûtes coniques, parce qu’un plan ne peut être perpendiculaire à leurs axes & à leurs côtés qui sont convergens : 2.o Qu’il y a des arcs droits aux voûtes sphériques, parce que leurs tangentes sont parallèles à leurs diamètres : 3.o Qu’il y a aussi des arcs droits dans les annulaires & dans les vis, où les tangentes sont perpendiculaires à leur diamètre, parce que la tangente du côté est parallèle à celle de leur axe courbe dans la section perpendiculaire à cette tangente. Frézier.

Arc-en-ciel. Iris, arcus cœlestis. C’est un tissu de plusieurs couleurs disposées en arc, bande, ou écharpe, qui paroît dans une nuée pluvieuse : ce qui arrive lorsque le soleil n’est pas beaucoup élevé sur l’horizon, dans la partie du ciel qui lui est opposée. On l’appelle autrement Iris. Il a au pluriel arc-en-ciels. Les Américains adoroient l’arc-en ciel, au rapport d’Acosta. L’arc-en-ciel ne paroît qu’avant ou après la pluie. On voit quelquefois un double ou triple arc-en-ciel ; mais les deux derniers sont plus imparfaits, moins vivement colorés, & de moindre étendue. ☞ Les couleurs sont renversées dans les deux arcs. Celles de l’arc principal, c’est-à-dire, celui qui est intérieur, en prenant du dedans en dehors, sont dans l’ordre suivant ; violet, indigo, bleu, vert, jaune, orangé, rouge. Elles sont arrangées au contraire dans l’arc extérieur, ou second arc, rouge orangé ; & ont la même apparence dans les jets d’eau des fontaines, dans les bouteilles pleines d’eau, & dans les verres prismatiques ou triangulaires, qui s’appellent aussi Iris. On prétend que l’arc-en-ciel n’est qu’un effet de la réfraction des rayons du soleil, laquelle se fait au travers des gouttes sphériques d’eau dont l’air est rempli, & qui sont tout-à-fait transparentes. Roh. Tous les Philosophes conviennent que le soleil éclairant d’un côté, & de l’autre la nue composée de gouttes d’eau en forme de rosée, est la cause de l’arc-en-ciel. Ceux qui tiennent pour les atômes, disent que les rayons du soleil frappant les angles de toutes les particules dont la nue est composée, ils sont réfléchis & renvoyés de tous côtés à l’œil. Mais à l’égard du nombre de ces angles, & de la manière dont les rayons sont réfléchis, ils répondent que telle est la nature des rayons du soleil, & des corpuscules aqueux répandus dans l’air, qu’une telle variété de couleurs soit produite par une telle situation. Bern. Les raisons en sont fort bien expliquées par M. Descartes. La lune forme aussi quelquefois un arc-en-ciel. Il est blanc, ou du moins ses couleurs sont si foibles qu’elles paroissent blanches. Aristote dit, qu’on ne l’avoit point remarqué avant lui, & qu’on ne l’apperçoit qu’à la pleine lune. Le Docteur Salomon Braun a observé un arc-en-ciel lunaire, le quatrième jour après la pleine lune d’Octobre en 1671. Dans les nouvelles de la république des lettres, il est parlé d’un arc-en-ciel qui parut à Mastricht en 1684, qui consistoit en des nuages droits & perpendiculaires comme de longues colonnes qui étaient transparentes, & avoient une disposition de couleurs toute contraire aux ordres de ce météore. Mentzélius dit, qu’il a vu des arc-en-ciels tout blancs en plein jour. M. Mariote, dans son quatrième essai de Physique, dit, que ces arc-en ciels sans couleurs se forment dans les brouillards, comme les autres se forment dans la pluie, & il assure en avoir vu par diverses fois, tant le matin après le lever du soleil, que la nuit à la lune. Enfin, il attribue ce défaut de couleurs à la petitesse des vapeurs imperceptibles qui composent les brouillards. Voyez Aristote, Descartes, Gassendi, Regis, Rohault, de la Chambre, &c. dans leurs Traités des météores.

M. de la Chambre écrit toujours arcanciel, pour arc-en-ciel, comme si ce mot n’étoit pas composé de ces trois-ci, arc en ciel ; c’est-à-dire, arc qui est, ou qui paroît dans le ciel.

Catherine de Médicis avoit pour devise un arc-en-ciel, avec cet hémistiche grec ΦΩΣ ΦΕΡΕΙ ΗΔΕ ΓΑΛΗΝΗΝ, elle apporte la lumière & la sérénité.

Arc-en-ciel, au figuré, est en termes de l’Ecriture, un signe d’alliance entre Dieu & les hommes, par lequel il leur a promis de ne leur plus envoyer le déluge. Arcus fæderis.

Arc. L’arc, ou Lar. Petite rivière de Provence. Arcus Luris, Larius. Elle a sa source près de Fourrières, passe à Aix, & se décharge dans la mer de Martigue, à Berre.

Arc, est aussi le nom d’une rivière de Savoie. Arcus. Elle sort du Mont Cénis au septentrion, vers les confins du duché d’Aouste. Elle traverse le Comté de Morienne & la Chambre, & se jette dans l’Isère, à quelque lieues au-dessous de Montmélian. Elle forme par son cours un arc, qui probablement lui a donné son nom.

Arc-en-Barois. Petite ville de France, en Bourgogne, sur la petite rivière d’Anjou, à quatorze lieues de Dijon, & à cinq lieues & demie de Langres.

Arc (Jeanne d’). Voyez Pucelle d’Orléans. Vaucouleurs, Dom-Remi.