Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/ANÉANTIR

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 344).
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ANÉANTIR. v. a. Réduire au néant, détruire absolument l’existence d’une chose. Ad nihilum redigere, Delere penitùs, Funditùs extinguere. Les corps naturels changent de forme ; mais ils ne s’anéantissent pas. De grandes villes ont été anéanties par les guerres, par les embrasemens. Le temps anéantit toutes choses. La grandeur romaine s’est anéantie, il n’en reste plus que l’ombre. Ce mot vient de son primitif néant. Il est opposé à créer, du néant faire quelque chose.

Anéantir, se dit figurément par exagération en parlant de diverses choses. Ce prince a anéanti toutes les lois. Il a anéanti plusieurs grandes maisons pour en élever d’autres. Ils anéantissent la morale chrétienne. Pasc. L’opinion de la destinée irrévocable va à anéantir tout le culte de la Réligion, & à éteindre l’amour des vertus. Port-R. Il y a des gens qui brillent dans l’action & dans le mouvement, & que le repos obscurcit & anéantit. Bouh.

Un torrent de feu l’embrase.
L’horrible poids qui l’écrase
Ne le peut anéantir. Anonyme, Ode sur l’Enfer.

Anéantir, est aussi réciproque, & signifie se dissiper, se réduire à rien. Cet homme avoit amassé de grands biens, & mis de grandes charges dans sa maison ; mais tout cela s’est anéanti avec le temps.

☞ Au figuré, les passions s’anéantissent, c’est-à-dire, se dissipent, s’éteignent.

s’Anéantir, en termes de dévotion, signifie aussi, s’humilier extrêmement pas la connoissance qu’on a de son néant. Ex intimo sui contemptu propè ad nihilum descendere, Abjicere se, se demittere. Saint Paul dit que le Seigneur s’est anéanti lui même en se faisant homme, & en prenant la forme d’un esclave. On n’affecte des distinctions dans les églises mêmes où doit s’anéantir toute la gloire humaine. Flech. Les Saints s’anéantissent continuellement en la presence de Dieu. Nicol.

ANÉANTI, IE. part.