Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/AMPHISBÈNE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 310).
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AMPHISBÈNE. s. m. Serpent à deux têtes, qui mord par la tête & par la queue. Amphisbena. On dit qu’il s’en trouve dans les déserts de Lybie, & il est le symbole de la trahison.

Le Griphon & le Phénix, dit Thomas Brown, n’existent point dans la nature, non plus que l’Amphisbène, espèce de serpent qu’on prétend avoir deux têtes, une à chaque extrémité, & cela sur ce fondement unique qu’il marche en avant & en arrière. Journ. des Sav. Juin 1733. On voit dans une phiole remplie d’esprit de vin le Serpent Amphisbène, ou le double-marcheur, reptile rond, fort, venimeux, qui rampe & qui se replie. Sa tête & sa queue sont difficiles à distinguer, étant faites l’une comme l’autre. Merc. Fév. 1736.

Quelques-uns mettent l’Amphisbène au rang des lézards. Aërius dit que la Scytala & l’Amphisbène sont semblables ; que ces animaux ne vont point en diminuant, & sont aussi gros d’un bout que de l’autre, desorte qu’il est difficile de connoître où est leur tête. L’Amphisbène va en avant & en arrière ; ce qui le distingue de l’autre. Leurs piqûres, quoique venimeuses, ne sont point mortelles ; mais sont comme celles des guêpes. On l’appelle autrement Ennoye, ou Enny : en latin Cæcilia & Amphisbena, qui vient de ἀμφὶ, & de βαίνω, je marche, comme serpent marchant de deux côtés, car on lui attribue deux têtes : & ce qui a donné occasion à cela, c’est que sa figure est toute semblable à celle des vers de terre, dans lesquels il est fort difficile de distinguer la tête d’avec la queue.

Il y a des scolopendres qui sont aussi de ce genre. Voyez Scolopendre. On s’en sert dans le Blason, & quelquefois on le confond avec emphistère, quoiqu’il en soit fort différent. Quand on ouvrit le tombeau de Chilpéric à Tournay, on y trouva des abeilles, & des figures de serpens Amphisbènes ou à deux têtes.

L’Amphisbène, avec ce mot, mordet utrinque, est la devise d’un satyrique, qui déchire les autres par ses discours & par ses écrits.