Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/ALCANNA

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 214-215).
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ALCANNA. s. m. Arbre qui est médiocrement élevé, dont le bois est blanchâtre, assez dur, & dont les branches sortent par paire du tronc, & en soutiennent d’autres. Celles-ci sont revêtues de feuilles qui gardent le même ordre, qui sont assez étroitement serrées, & ne vont pas jusqu’à la fin de la branche, qui se termine toujours par une épine longue, assez foible. Ses feuilles sont d’un vert jaunâtre, & ont la figure d’un fer de pique, plus larges vers la pointe qu’en approchant de la queue ; elles ont deux pouces & quelques lignes de longueur, sur onze lignes de largeur, & ce sont les plus grandes. Ses fleurs naissent en forme de bouquet, à l’aisselle des branches : chaque fleur est composée de quatre ou cinq pétales, d’un pourpre sale, disposées en rose autour du pistil, & soutenue par un calice d’une seule pièce découpée jusqu’à la base ; son pédicule est assez court & assez délié. Huit étamines blanches, disposées deux à deux, portant des sommets fort petits, environnent le pistil, qui devient une baie du volume de celle du genévrier. Cette baie contient, sous une écorce cassante, un nombre prodigieux de semences triangulaires & un peu pyramidales. Plusieurs Auteurs de botanique ont confondu cet arbre avec le Troëne ou avec le Filaria. Prosper Alpin nous a donné le premier la description de l’Alcanna dans son Traité des Plantes d’Egypte, p. 44. La figure qu’il en donne n’est pas exacte, comme l’a fort bien remarqué Veslingius, pag. 16. On peut avoir recours à l’Hortus Malabaricus, vol. i, pag. 37, où l’on verra une branche de cet arbre très-bien dessinée sous le nom de Mail-anschi ; sa description est très-correcte. Cet arbre vient donc dans les Indes aussi-bien qu’en Egypte, où il est appellé Elle-hanne, & Alcanna, par les Médecins. On a cru que c’étoit le Cyprus de Pline, & qu’il devoit se rapporter au genre du Troëne, mais mal à propos, comme on le peut voir à l’article de Troëne. Les feuilles de l’Alcanna sont fort astringentes ; on en fait un grand trafic au Caire après les avoir réduites en poudre, qu’on nomme Archenda, de laquelle les femmes se servent pour se teindre les oncles & les cheveux en jaune doré. Cette même poudre jetée dans de l’eau chaude est un remède dont on use pour supprimer la trop grande sueur des pieds, en les y baignant, & en y appliquant le marc. Les Transactions philosophiques, Tom. 2, pag. 645, disent que l’Alcanna est la feuille d’une plante, qui, quand elle est trempée pendant une nuit dans du vin, rougit les cloux.

☞ Nous continuerons d’appeler Alcanna, l’arbre dont on vient de parler, malgré le reproche qu’on nous fait dans le nouveau Vocabulaire, de donner gratuitement à l’arbre le nom de la poudre qu’on tire de ses feuilles. Bien d’autres que nous lui ont donné ce nom ; & nous ne voyons pas pourquoi nous nous en rapporterions gratuitement à la décision des Vocabulistes.