Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/ACQUITTER

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 94).
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ACQUITTER. v. act. Payer une dette. Solvere. J’ai acquitté cette promesse, cette obligation. On dit, acquitter des lettres & billets de change, des promesses, des obligations ; pour dire, les payer.

Acquitter, signifie aussi, libérer, décharger d’une hypothèque. Liberare ære alieno. J’ai acquitté ce fonds, je l’ai déchargé de toutes les dettes auxquelles il étoit hypothéqué. J’ai acquitté toute la succession de mon pere, elle est franche & quitte ; je me suis acquitté envers tous les créanciers.

Acquitter, signifie aussi, payer des droits pour des marchandises aux entrées & sorties du Royaume, aux entrées des Villes, & dans les Bureaux du Roi. Ce Marchand fait un gros commerce, il a acquitté, il a payé cette année pour plus de 10000. liv. de droits au Roi.

On le dit aussi avec le pronom personnel. S’acquitter d’une dette. On dit en proverbe, qui s’acquitte s’enrichit.

On dit figurément, s’acquitter envers quelqu’un ; pour dire, reconnoître par ses services les obligations qu’on lui a. Referre gratiam. Le trop grand empressement qu’on a de s’acquitter d’une obligation est une espèce d’ingratitude. Rochef. Rarement aime-t-on les gens à qui on est trop obligé ; & l’impatience de s’acquitter, si louable en apparence, n’est souvent qu’un dépit secret d’être trop long-temps redevable. Le Gend. La France entière a joui du fruit de ses travaux, & de ses exploits, (de M. le Maréchal de Luxembourg) mais la Normandie les a, pour ainsi dire, récompensés ; elle a été jugée digne d’acquitter la France envers ce Héros, & envers un fils qui lui a aidé à cueillir ces lauriers. M. Brunel.

Acquitter, se dit aussi en choses morales, en parlant des devoirs & des obligations de la vie ; c’est-à dire, y satisfaire, & les bien remplir. Officio, munere fungi. C’est un homme qui s’acquitte bien de tous les devoirs d’un chrétien, d’un ami. Il s’acquitte bien de son emploi, de sa charge. Chargez-le de cette harangue, de cette affaire, de cette négociation ; il s’en acquittera fort bien. En vérité on ne fait ici-bas que charger les comptes, & au lieu d’acquitter les dettes passées, l’on en contracte incessamment de nouvelles. Ab. de la Tr.

On dit aussi figurément, acquitter un autre de ce qu’il doit ; pour dire, faire pour lui ce qu’il devroit faire lui-même.

On dit encore, s’acquitter de sa promesse, s’acquitter d’un vœu ; pour dire, accomplir sa promesse, accomplir un vœu. Il faut être régulier à s’acquitter de sa promesse. Il vaut mieux ne point faire de vœu, que de s’en acquitter mal.

On dit figurément, acquitter sa conscience ; pour dire, faire ce qu’on croit être obligé de faire en conscience.

On dit au Jeu de Billard, s’acquitter, pour dire, jouer le premier coup pour se mettre en passe.

On dit par raillerie d’un homme qui a acheté une charge à crédit, qu’il s’acquitte bien de sa charge, quand il prend de l’argent pour rendre la justice. On dit encore, il se ruine à promettre, mais il s’acquitte à ne rien tenir. Ces façons de parler sont extrêmement populaires.