Deux vers d’Alcée

Œuvres de L. AckermannAlphonse Lemerre, éditeur (p. 35-36).
XIII


DEUX VERS D’ALCÉE


Ἰόπλοχ’ ἁγνά μειλιχόμειδε Σαπφοῖ,
Θέλω τι ϝεἰπñν, ἀλλά µε κωλύει αἰδώς.
Alcée.


Quel était ton désir et ta crainte secrète ?
Quoi ! le vœu de ton cœur, ta Muse trop discrète
Rougit-elle de l’exprimer ?
Alcée, on reconnaît l’amour à ce langage :
Sapho feint vainement que ton discours l’outrage,
Sapho sait que tu vas l’aimer.


Tu l’entendais chanter, tu la voyais sourire,
La fille de Lesbos, Sapho, qui sur la lyre
Répandit sa grâce et ses feux.
Sa voix te trouble, Alcée, et son regard t’enflamme ;
Tandis que ses accents pénétraient dans ton âme,
Sa beauté ravissait tes yeux.

Que devint ton amour ? L’heure qui le vit naître
L’a-t-elle vu mourir ? Vénus ailleurs, peut-être,
Emporta tes vœux fugitifs.
Mais le parfum du cœur jamais ne s’évapore ;
Même après deux mille ans, je le respire encore
Dans deux vers émus et craintifs.