Dernier carnet de route au Soudan français - La fin de la mission Klobb/16

CHAPITRE VII




SOMMAIRE
Ordre de rentrer en France. — Joie du retour. — Visite au fama Mademba. — Surprise occasionnée par les nouvelles de France.



25 Mars 1899.

Pourquoi suis-je en route pour rentrer en France ? Parce que j’ai reçu un télégramme me disant que, mon temps de séjour étant terminé, je devais rentrer. Pourquoi ai-je reçu ce télégramme ? Cela je n’en sais rien. Ce que je sais, c’est que j’ai obéi aussitôt, enchanté de revenir. Et je suis d’autant plus enchanté au fur et à mesure que je m’avance. Il y a assez longtemps que je suis au Soudan. Si j’attendais d’être malade pour quitter, ma santé est si bonne, que je pourrais attendre dix ans. Le plaisir de me retrouver au milieu des miens vaudra largement celui d’être avec mes soldats noirs.

Je serai de retour tout juste pour la bonne saison, bonne saison de France, bien entendu, en date du 5 au 15 Mai, car pour celles du Soudan, plus ou moins favorables à mes voyages, il y a longtemps que je n’y fais plus attention.

J’ai vu, sur mon chemin de retour, le fama Mademba. J’ai déjeuné avec lui. Sur des nattes, à côté de la table, étaient assises deux de ses femmes, et une dizaine de ses enfants, tous à peu près du même âge. Ma connaissance de la langue bambara m’a permis de causer aimablement avec « ces dames ». Je suis très connu dans la maison, comme dans toutes les maisons indigènes d’ailleurs ; nulle part, je ne suis dépaysé, quand je me promène au Soudan, il n’y a pas de poste où je ne passe, et où ne me viennent un certain nombre de gens m’ayant connu à telle ou telle époque. La question est toujours la même « Est-ce que tu reviendras ? » Je dis « oui », parce que j’ai toujours dit oui, les autres fois, et que toujours je suis revenu. En y réfléchissant, j’aimerais peut-être mieux prendre ma retraite au Soudan qu’à Paris.

Jusqu’à aujourd’hui, j’ai voyagé en bateau. Je puis dire que j’en ai assez. J’ai quitté Gargouna le 5 Février ; je me suis arrêté à Gao, à Bamba, à Tombouctou, à Mopti et à Segou. Ce matin, je suis parti de Koulikoro à cheval, ce qui m’a fait un sensible plaisir.

J’ai appris l’autre jour que M. Loubet était Président de la République. J’ignorais totalement que M. Félix Faure ne le fût plus. La nouvelle m’a causé une surprise assez naturelle. Un courrier de France, que j’attends aujourd’hui, me donnera un utile supplément d’informations.