Élégies et Sonnets/Depuis qu’Amour cruel empoisonna…

IIII


Depuis qu’Amour cruel empoisonna
Premierement de son feu ma poitrine,
Tousiours brulay de sa fureur diuine,
Qui un seul iour mon cœur n’abandonna.

Quelque trauail, dont assez me donna,
Quelque menasse et procheine ruine :
Quelque penser de mort qui tout termine,
De rien mon cœur ardent ne s’estonna.

Tant plus qu’Amour nous vient fort assaillir,
Plus il nous fait nos forces recueillir,
Et tousiours frais en ses combats fait estre :

Mais ce n’est pas qu’en rien nous fauorise,
Cil qui les Dieus et les hommes mesprise :
Mais pour plus fort contre les fors paroitre.