De la sagesse/Livre III/Chapitre XL

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LIVRE 3 CHAPITRE 40


du luxe et desbauche en tous couverts et paremens, et de la frugalité.

il a esté dict cy-dessus que le vestir n’est poinct originel, ny naturel, ny necessaire à l’homme ; mais artificiel, inventé et usurpé par luy seul au monde. Or à la suitte qu’il est artificiel (c’est la coustume des choses artificielles de varier, multiplier sans fin et sans mesure ; la simplicité est amie de nature), il s’est estendu et multiplié en tant d’inventions (car à quoy la pluspart des occupations et trafiques du monde, sinon à la couverture et parure des corps ?) de dissolutions et corruptions, tellement que ce n’a plus esté une excuse et un couvert de deffauts et necessitez, mais un nid de vices, (…), subject de riottes et querelles : car de là premierement a commencé la proprieté des choses, le mien et le tien, et la plus grande communauté qui soit, si sont tousiours les vestemens propres ; ce qui est monstré par ce mot françois, desrobber. C’est un vice familier et special aux femmes, que le luxe et l’excez aux vestemens, vray tesmoignage de leur foiblesse, voulant se prevaloir et rendre recommandables par ces petits accidens, pource qu’elles se sentent foibles et incapables de se faire valoir à meilleures enseignes ; celles de grande vertu et courage s’en soucient beaucoup moins. Par les loix des lacedemoniens, il n’estoit permis de porter robbes de couleur riches et precieuses qu’aux femmes publicques ; c’estoit leur part, comme aux autres la vertu et l’honneur. Or le vray et legitime usage est de se couvrir contre le froid, le vent, et autres rigueurs de l’air. Pour ce ne doibvent-ils estre tirez à autre fin ; et par ainsi non excessifs ny somptueux, ny aussi vilains et dechirez : (…). Caligula servoit de risée à tous par la dissolution de ses habillemens. Auguste fust loüé de sa modestie.