chez Volland, Gattey, Bailly (p. 1-3).



DE LA MORALE
NATURELLE




CHAPITRE I.

Des impressions physiques.



S’il est des impressions physiques absolument irrésistibles, il en est assurément un grand nombre qu’il dépend de nous de modérer, d’affaiblir, de diriger, d’anéantir peut-être. Il en est encore beaucoup qui n’ont acquis un pouvoir extrême que parce que nous l’avons voulu, ou parce que nous n’avons jamais songé à lui prescrire aucune limite.

Si les impressions physiques ont une grande influence sur ce que nous appelons notre cœur ou notre imagination, notre cœur et notre imagination prennent à leur tour un grand empire sur elles.

Les mêmes impressions souvent renouvelées s’affaiblissent ou se renforcent, suivant la nature même des objets qui les font naître, ou les différens rapports que ces objets peuvent avoir avec notre manière de sentir.

L’habitude qui flétrit certaines impressions, en rend d’autres infiniment plus vives.

Ce qui n’était qu’un goût devient une passion, un besoin prédominant, un penchant invincible.

Ce qui semblait un penchant invincible, n’est plus qu’un besoin naturel, un désir modéré, un goût simple.

Ce qu’on cherchait avec le plus vif empressement, l’on finit quelquefois par l’éviter avec le même soin, le craindre, le dédaigner ou l’oublier entièrement.

Il est une manière de vivre, de se nourrir, de disposer de son temps, de ses exercices, de son travail, qui ôte ou donne aux impressions purement physiques plus ou moins d’influence, plus ou moins d’énergie.