De l’Homme/Section 1/Chapitre 2

SECTION I
Œuvres complètes d’Helvétius, De l’HommeP. Didottome 7 (p. 25-26).
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CHAPITRE II.

Du moment où commence l’éducation.

C’est à l’instant même où l’enfant reçoit le mouvement et la vie qu’il reçoit ses premieres instructions. C’est quelquefois dans les flancs où il est conçu qu’il apprend à connoître l’état de maladie et de santé. Cependant la mere accouche ; l’enfant s’agite, pousse des cris ; la faim l’échauffe ; il sent un besoin ; ce besoin desserre ses levres, lui fait saisir et sucer avidement le sein nourricier. Quelques mois s’écoulent, ses yeux se décillent, ses organes se fortifient ; ils deviennent peu-à-peu susceptibles de toutes les impressions. Alors le sens de la vue, de l’ouïe, du goût, du toucher, d’odorat, enfin toutes les portes de son ame sont ouvertes. Alors tous les objets de la nature s’y précipitent en foule, et gravent une infinité d’idées dans sa mémoire. Dans ces premiers moments, quels peuvent être les vrais instituteurs de l’enfance ? les diverses sensations qu’elle éprouve : ce sont autant d’instructions qu’elle reçoit.

A-t-on donné à deux enfants le même précepteur, leur a-t-il appris à distinguer leurs lettres, à lire, à réciter leur catéchisme, etc. ; on croit leur avoir donné la même éducation. Le philosophe en juge autrement. Selon lui, les vrais précepteurs de l’enfance sont les objets qui l’environnent ; c’est à ces instituteurs qu’elle doit presque toutes ses idées.