De l’Angélus de l’aube à l’Angélus du soir/Je sais que tu es pauvre

JE SAIS QUE TU ES PAUVRE…


Je sais que tu es pauvre :
tes robes sont modestes.
Mine douce, il me reste
ma douleur : je te l’offre.

Mais tu es plus jolie
que les autres, ta bouche
sent bon — quand tu me touches
la main, j’ai la folie.

Tu es pauvre, et à cause
de cela tu es bonne ;
tu veux que je te donne
des baisers et des roses.


Car tu es jeune fille :
les livres t’ont fait croire
et les belles histoires,
qu’il fallait des charmilles,

des roses et des mûres,
et les fleurs des prairies ;
que dans la poésie
on parlait de ramures.

Je sais que tu es pauvre :
tes robes sont modestes.
Mine douce, il me reste
ma douleur : je te l’offre.


1888.