(pseudo non identifié)
Éditions de Minuit, 8 rue de Tracy (p. 155-163).
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XVII

Pourquoi Mademoiselle de Verneuse a-t-elle décidé de partir aujourd’hui, seule avec le vieux Gaspard, pour une longue excursion dans les environs de Bourgville ? Jacqueline et Roger se le demandent.

Les enfants naïfs ne se doutent pas que la malicieuse jeune femme s’est enfuie ce matin dans la vieille voiture, pour les laisser seuls, en proie à leurs réflexions et à la tentation charnelle.

Ils ne s’en doutent pas !… Si, Roger, un peu, car il a compris ce que signifiait l’œillade polissonne de la jolie Colette, quand il l’accompagna tout à l’heure jusqu’à la voiture du vieux Gaspard.

N’était-ce pas un encouragement à faire de Jacqueline, enfin, sa maîtresse ?…

Roger ne se trompait guère, car Colette aujourd’hui sortait seule en dehors du domaine, pour permettre à la petite châtelaine, de succomber au gros péché mystérieux indiqué par son catéchisme : l’œuvre de chair interdite en dehors du mariage !…

Jacqueline boude toujours le pauvre Roger. Et cependant, celui-ci, depuis ce matin, s’ingénie à plaire à la blonde enfant.

Après le déjeuner, il se décide enfin à lui proposer une promenade dans le parc, et avec polissonnerie, il lui dit :

— Dans le parc, à l’endroit même où je vous ai vu le premier jour, nue en compagnie de Colette…

— Oh ! répond Jacqueline, qui se déride un peu, vous m’avez vue nue une autre fois…

— Oh ! oui, Jacqueline chérie, et vous en conservez le souvenir !

Comme j’en suis heureux ! Et comme je souhaite recommencer ce que nous fîmes tous les deux ce jour-là !…

Jacqueline, rougissante, entraîna le jeune homme dehors.

— Alors, vous voulez bien aller avec moi, dans le parc ?…

La douce Jacqueline ne répondit pas, mais elle se laissa guider à travers les allées, vers le lieu délicieux gardé par les satyres et les nymphes de marbre…

Quand ils furent arrivés au cœur du petit bosquet touffu, Jacqueline fut secouée par un tremblement léger, et Roger s’approchant d’elle, put voir ses beaux yeux langoureux, fermés à demi.

Le jeune homme couvrit de baisers, le visage de la petite châtelaine, tout en caressant ses boucles blondes. Et pour la première fois, il osa lui dire :

— Ah ! comme je vous aime ! Jacqueline, Jacqueline chérie !…

Puis, tout doucement, il lui plia la taille pour la coucher dans l’herbe propice.

Jacqueline se laissa faire. Sentait-elle qu’il lui serait impossible d’échapper plus longtemps ?… Elle-même était-elle remplie d’un secret désir ?… C’est à cette seconde hypothèse que le jeune amoureux s’arrêta, car la mignonne petite blonde n’offrait plus maintenant aucune résistance.

Tout à son aise, il put retrousser sa robe, et elle l’aida dans ce travail de préparation libertine, en écartant ses jambes…

…Maintenant, Roger à genoux près d’elle, la contemple amoureusement. Toute sa timidité le reprend, et il se met à trembler… Il n’ose pas se déshabiller à son tour, et plein de confusion, il se jette entre les cuisses de la jolie Jacqueline…

…Il sent la douceur veloutée de sa chair, et ce voluptueux contact ravive son désir. Elle-même d’ailleurs, d’une forte pression lui maintient le visage là où il est, et bientôt, écartant les derniers obstacles de soie, il sent la douce toison sous ses lèvres avides d’arriver au trésor caché.

 

Jacqueline manifeste son plaisir, et ses gémissements excitent davantage son compagnon dans son amoureuse besogne.

Très longuement, il l’embrasse et la caresse, mais soudain, son désir s’exaspérant en se précisant, il s’arrache de l’étreinte des cuisses nerveuses ramenées sur son cou, glisse le long du corps étendu, et peut atteindre le visage. De ses lèvres, il étouffe les gémissements de la jeune fille, et il peut enfin accomplir ce qu’il désire depuis longtemps.

Il a d’abord quelque peine, et ses mouvements malhabiles ne parviennent pas à le servir. Car Jacqueline ne fait rien pour lui faciliter la besogne ! Tremblante et doucement gémissante, elle murmure sans trop de conviction :

— Non, non, mon chéri !…

Mais au bout de quelques instants, les voluptueux efforts de Roger de Huchetelles sont récompensés. Jacqueline desserre lentement ses jambes, découvrant ainsi son trésor intime, livré à la juvénile virilité de l’amoureux, transporté dans un océan de délices…

Il fait de son mieux, comme l’experte Colette le lui a enseigné, et soudain, Jacqueline pousse un grand cri où semblent se confondre le plaisir et la douleur.

— Eh ! bien, Jacqueline chérie, ton oiseau vient de s’envoler !…

Les deux amants se lèvent, surpris d’entendre la voix claire et joyeuse de Colette. Quoi ! la jeune femme est déjà revenue de sa longue excursion ?…

Mais oui, et elle a assisté, silencieuse, à toute la voluptueuse scène. Et maintenant, comme une bacchante ivre, elle se jette entre Jacqueline et Roger, ravivant leur ardeur, leur enseignant des caresses plus subtiles, plus compliquées, prenant sa part d’amour et de volupté…

Et quand la nuit commence à tomber sur le parc, allongeant les ombres des grands arbres comme d’irréels fantômes géants, les deux jeunes filles et leur amant commun, sont encore plongés dans une voluptueuse ivresse.

C’est ainsi que Jacqueline de Rembleynes et Roger de Huchetelles, devinrent des fervents du jeu d’amour. Car ces ébats furent suivis de beaucoup d’autres, et pas un jour ne s’écoula depuis, sans qu’ils fûssent à même de sacrifier à Vénus, soit ensemble, soit avec la libertine Colette.

Et quand Jacqueline quelquefois pense aux leçons de son catéchisme, elle ne peut s’empêcher de sourire, car la luxure lui apparaît maintenant sous les traits de la jolie Colette de Verneuse !…

FIN