Décrets des sens sanctionnés par la volupté/10

A Rome, De l’Imprimerie du Saint Pere, M. DCC. LXXXXIII (p. 69-).

FOUTERIE DE VILLAGE,
OU

Claudinette qui s’y prend par tout les bouts.


EH ! qu’importe le lieu, le tems ou la manière pour foutre avec plaisirs, il suffit de bander ; le conte suivant fournit une preuve convaincante de cet argument incontestable, et je vais le mettre en action.

Claudinet, jeune villageois d’Arpajon, aimait passionnément Claudinette ; celle-ci de son côté, paraissait sensible aux tendres sentimens de Claudinet ; l’amour avait formé ces deux amans l’un pour l’autre. Claudinet, sous sa blouse villageoise, réunissait les agrémens d’un Adonis de la ville ; la nature l’avait doué de toutes les facultés qui composent un fouteur mâle et vigoureux ; il n’avait pas l’éloquence de nos petits-maîtres ; il ignorait l’art imposteur de débiter la fleurette ; mais il avait un vit pour la jouissance duquel, toutes les duchesses douairières de la capitale auraient formé des vœux, surtout dans le siècle où nous sommes, ou dans ce qu’on appelle la classe des femmes galantes de qualité ; vit ferme et rubicond est un passe-partout pour arriver à l’opulence, et couilles velues et retroussées sont les creusets d’un vrai mérite. En effet, ce membre souverain n’est-il pas le plus puissant des argumens auprès d’une femme libertine et passionnée qui se consume en desirs brulans pour la chose et qui se soucie fort peu du mot. J’en ai pour garant le trait historique que je vais citer en passant, avant que d’en venir à mes héros de village.

Le Bailly de Vignacourt, prieur de l’ordre de Malthe et possesseur du joli pavillon Malthois, sis rue Saint-Sébastien, près le Pont-aux-Choux, faisait, depuis long-tems, une cour assidue à madame de Rohan-Chabot, demeurant à la Place-Royale, cette femme impétueuse et lascive tout aussi connue par sa naissance, que par la lubricité de ses mœurs, n’aurait point, à-coup-sûr rejetté ses hommages, si d’abord il s’y fut pris de la manière dont il conclut ses affaires auprès d’elle. Vingt fois il essaya de lui peindre son douloureux martyre ; mais vingt fois, comme il était bègue, sa parole expira sur ses lèvres.

Un jour, que profitant de la permission qu’il avait d’entrer à toute heure et dans les endroits les plus secrets de l’appartement de la ribaude de Chabot, il pénétra jusques dans son cabinet de toilette, dans un de ces momens où une femme, telle qu’elle soit, n’est pas fâchée d’être surprise ; la déesse de ce sanctuaire voluptueux, pour procéder à une toilette complette, était dans le costume de madame Eve, à l’instant où le serpent tentateur lui avait insinué dans le vagin le bout de sa queue, et lui avait donné des notions directe des plaisirs charnels, conséquemment elle était nue ; elle découvrait donc aux yeux du bailly de Vignacourt une gorge d’albâtre, ferme, quoique élastique ; une moniche enchanteresse, et tous ces jolis brimborions qui tournent ordinairement la tête des hommes les plus sages et les plus indifférens.

Suivant son importune coutume, il s’apprêtait déjà à faire un éloge magnifique de la fermeté des cuisses et des tettons de la dame de Chabot, et des autres appas qui s’offraient à ses regards, quand le génie de la lubricité l’inspira, et alors il se dit à lui-même : imbécile, tu veux parler, et la nature ingrate pour toi, au moins sur ce chapitre, t’a refusé le don de l’éloquence ; mais n’as-tu pas un vit. Eh ! morbleu, fais-en ton interprète ; d’après cette courte consultation, il tira de sa culotte un engin énorme, puis il balbutia ce peu de mots. Incomparable, je vous adore, je bande pour vous depuis long-tems,

Et sans vous arrêter à des discours frivoles,
Convenez que mon vit vaut mieux que des paroles.

La harangue fit son effet ; si l’éloquence parabolique du bailly de Vignacourt, lui avait fait faux-bon en maintes occasions, son vit répara sa gloire. Je tire le rideau sur cette scène de plaisirs que je ne viens de citer que pour prouver qu’un vit de bon alloy est suffisant pour désarmer l’orgueilleuse ; la fière, la prude et la bigotte, et que cinq pouces de cet instrument, mis en exhibition, avancent mieux les affaires d’un fouteur auprès d’une femme aimable et passionnée sur cet article, que toutes les fleurs de rhétorique de nos académiciens. Je reviens maintenant à Claudine et à Claudinet.

Ce rustre frais et gaillard, ne voyait point passer Claudinette dans le village, qu’aussitôt son vit ne se redressât. Ce symptôme est tout aussi compréhensible pour un paysan que pour un citadin. Alors échauffé dans son harnois, l’égrillard villageois se disait à part lui, morgué, qu’elle est gentrouillette ; qu’elle a la jambe fine ; avec quel plaisir je baiserais ces jolies pommes de rainette qu’elle a sur l’estomach ; quel cul une fille comme-ça doit vous avoir ; quelles hanches. Il faut observer que Claudine portait le plus ordinairement un juste étroit, et parfaitement serré, une cotte très-courte de flanelle, de manière qu’il était impossible qu’elle se baissât pour travailler aux champs, sans exposer aux yeux des curieux qui se trouvaient derrière elle, des cuisses blanches et éblouissantes, indices parfaits des trésors qui se trouvaient au-dessus.

Je laisse à penser si Claudinet qui n’avait que la plus imparfaite idée d’un con, et qui avait encore son pucelage, bandait en voyant seulement la jarretière de Claudinette ; la paysanne qui n’y entendait pas malice, ne prenait aucun soin de voiler ses robustes appas, l’innocence des premiers tems règnait encore en elle, et cependant elle était de complexion amoureuse ; il y avait des momens où la chaleur interne de son conin était embrâsé, lui faisait desirer de s’approximer avec Claudinet, qu’elle préférait à tout autre garçon du village ; mais elle craignait l’infanterie ; ce n’était pas la fouterie qui lui faisait peur ; mais les enfans ; qu’auraient dit les pères et mères, les envieuses, et par-dessus tout monsieur le curé, qui, quoique fabriquant en secret de petits populos à une jeune et charmante nièce qu’il avait, n’aurait pas manqué de condamner Claudinette, et le fruit de ses embrassemens voluptueux au feu éternel, à la suite d’un prône bêtement rustique ; mais capable d’effrayer maints esprits villageois.

Claudinette se tenait donc sur la réserve ; mais elle desirait ; son sang enflammé la faisait soupirer pour le fruit défendu, et fille qui desire ardemment et qui soupire, ne tarde pas à en découdre ; c’est directement ce qui arriva à nos jeunes et empressés campagnards.

Claudinet ne rencontrait pas de fois Claudine qu’il ne lui appliquât sur la bouche le plus vigoureux des baisers. Claudine se défendait ; mais de cette manière qui redouble la hardiesse de l’assaillant, et qui semble lui dire, finissez donc ; mais faites toujours. A ce jeu l’apprentif est bientôt maître ; Claudinet chiffonnait avec sa langue, Claudine le mordait ; il glissait ses doigts libertins dans le corset de sa belle, il lui prenait les tettons ; Claudine, encore toute neuve, et point blâsée sur l’excès des jouissances, déchargeait sans doute ; mais ce n’était pas là le tu autem. Tous les deux desiraient foutre, et tous les deux ne savaient comment s’y prendre.

Au tems de la moisson, saison propice aux amans, et où la nature se plaît à échauffer les êtres, qui, d’un bras infatigable, récoltent les productions de la terre ; Claudinet cherchant à se soustraire aux rayons du Soleil, se reposa auprès d’une haie ; il s’était dérobé à la chaleur de Phébus ; mais le desir de la jouissance l’avait suivi jusques dans cette retraite. Mille réflexions amoureuses dominaient son imagination ; il se croyait sans témoin, et par conséquent se laissait aller à toutes les idées que sa passion pour Claudine pouvait lui inspirer ; il se retraçait ses tettons, sa jambe fine et déliée, ses cuisses fermes et robustes, et tout en faisant cette analyse idéale, son membre viril prenait la forme, la grosseur, la roideur d’une pine d’élu, non de ces élus de la municipalité Parisienne ; mais bien de ces êtres bandans et privilégiés que l’amour et la nature admettent à l’élection.

Il le tira de sa culotte, et la nature continuant ses leçons, lui apprit l’usage qu’il en devait faire, et à pelotter en attendant partie. Claudinet se branla donc ; mais tandis qu’il secoue son nerf érecteur rejoignons Claudinette, qui glanant dans le champ du fermier du château, écoutait en se moquant les protestations ridicules du magister du lieu ; Thomas, ainsi se nommait ce magister, déplaisait autant à Claudinette, que Claudinet lui tenait au cœur ; ce Ciceron de village avait déjà, sans succès, appréhendé au corps sa dulcinée campagnarde, sans en avoir pu jouir ; il venait de faire encore une tentative inutile, quand Claudinette se sauvant de ses poursuites arriva juste à l’endroit où Claudinet se branlait en pensant à sa bien-aimée.

Il est des besoins naturels à satisfaire ; Claudine avait envie de pisser, elle ne se croyait pas suivie par le magister Thomas ; ainsi donc elle entra dans le clos où s’était réfugié Claudinet, qui, comme je l’ai dit, se branlait, en attendant mieux ; Thomas se glissa derrière la haie, et observa ce que je vais rapporter ; et ce qu’il prit pour effet médité ce qui n’était qu’un effet du hasard.

Claudinette se croyant seule, et voulant vaquer au besoin urinal qu’elle ressentait, se troussa avec soin pour ne point éclabousser son cotteron, et sans s’embarrasser des yeux surveillans de Thomas le magister, et des yeux de Claudinet qui s’occupait au même endroit à se gratter la roupette en l’honneur de sa tendre amie ; elle guinda cottes et chemise au haut de ses hanches, et se mit à pisser.

Claudinet l’apperçut ; bon, s’écria-t-il, c’est mon bon Ange qui me l’envoie ; en tapinois il s’approcha de sa belle, et sans lui donner le tems de se rajuster, il la saisit au ventre. De quel étonnement ne fût-il pas saisi en reconnoissant que Claudinette était garnie jusqu’au nombril d’une bonne quantité de poils noirs et épais ; en femme qui desire la chose, mais qui paraît vouloir s’y opposer, Claudinette se retourne et dit à Claudinet qui l’enconne : par la sangoi, t’as donc la rage au cul, laisse-moi. Non par la figué, repart le fouteur villageois, j’y suis. Eh ! par la morguenne il faut qu’il y entre ; Claudinette ne demandait pas mieux, mais pour la forme il fallait qu’elle se défendît, et tout en se défendant, elle agissait si bien du croupion, qu’elle n’en facilita que mieux l’affaire ; cependant Claudinet, expéditif, avança la besogne,.... Que fais-tu donc, dit Claudinette ? j’avance..... j’enfonce. Ah ! vas plus vite..... d’accord..... mais Je décharge à la porte.

Le magister Thomas, témoin de ces transports, ne manqua pas d’en rendre compte ; que s’en suivit-il ? On maria Claudinet et Claudinette ; Claudinette foutit toujours, c’est la devise des femmes. Claudinet fut cocu au village comme à la ville ; c’est un mal qui se gagne.