Déception et Tristesse
Savoir souffrir la vie et voir venir la mort,
C’est le devoir du sage, et ce sera mon sort !…
Le désespoir n’est point d’une âme magnanime ;
Souvent il est faiblesse, et toujours il est crime.
(Gresset)
Je n’ai pas convoité sur mon lit d’agonie
L’or du voisin qui sonne avec tant d’ironie ;
Ce qu’il me faut, à moi, ce n’est pas seulement
Le vin de la vendange et le pain du froment ;
Ma prière avant tout demande à Dieu pour vivre
Le pain qui nourrit l’âme et le vin qui l’enivre :
L’amour !… et je suis seul !…
(Hégesippe Moreau)
DÉCEPTION ET TRISTESSE
J’ai contemplé des lieux où j’ai vu le bonheur
Scintiller un instant, pâlir et puis s’éteindre :
Tel un brillant mirage aux yeux du voyageur
Présente l’oasis, qu’il ne peut pas atteindre.
Oui, j’ai voulu revoir ces rivages chéris
Où m’a bercé longtemps l’espérance trompeuse,
Qui, comme l’arc-en-ciel au brillant coloris,
Promettait des beaux jours à ma vie orageuse.
J’ai voulu procurer à mes sens affaiblis,
À mon âme ulcérée, un peu de jouissance,
Avant qu’un froid linceul, de ses funèbres plis,
N’enveloppât mon corps brisé par la souffrance.
Insensé ! je partis, plein d’un seul souvenir,
Mais je n’ai recueilli dans ce pèlerinage
Que des chagrins amers ; il fallut revenir,
Maudissant à jamais ce funeste voyage.
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Cette félicité que rêva mon délire,
Cet avenir heureux que me promit l’amour
Fut une illusion qui n’a fait que sourire ;
L’orage se formant a chassé le beau jour,
Et l’espérance aussi, décevante ironie,
Qui me promit toujours et sans jamais tenir :
Espérez ! espérez ! ainsi passe la vie…..
Et l’attente du jour qui ne doit pas venir !
Quand je vois l’édifice où mon adolescence
Écoutait les leçons des savants professeurs
Qui m’ouvraient les trésors de leur vaste science,
Ce souvenir cruel augmente mes douleurs.
Heureux, trois fois heureux celui qui, loin du monde,
Peut borner ses désirs et son ambition !
Heureux celui qui vit dans une paix profonde,
Et s’affranchit du joug de toute passion !
Ma vie est un flambeau qui pâlit et s’éteint ;
Tout est fini pour moi ! Mon Dieu, que ta clémence
Pardonne à mes erreurs ! d’un coup mortel atteint,
Je réclame de toi ma propre délivrance.
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Hélas ! combien de fois, songeant à ma misère,
J’ai résolu de mettre un terme à mes malheurs !
Un seul nom m’arrêtait ; c’est celui de ma mère,
Ah ! ce serait pour elle une source de pleurs !
J’ai dû vivre !…Accablé du poids de la souffrance,
Je gémis et n’attends que l’heure de ma mort,
Qui doit bientôt venir….que n’ai-je l’espérance
De savoir qu’un ami pleurera sur mon sort ! ! !
Envoi.
Ô vous que je chéris comme une tendre mère,
Vous qui, par vos vertus, attirez tous les cœurs !
Recevez aujourd’hui ce poème éphémère
Qu’exhale une âme en deuil en proie à ses douleurs.
Si vos yeux indulgents se plaisent à le lire ;
Si vous compatissez à mes tourments affreux,
Je n’aurai pas perdu la peine de l’écrire :
J’aurai goûté, du moins, encore un jour heureux !
1839