Croquis de cloître (Verhaeren)

Pour les Amis du Poète (p. 7-8).


Croquis de cloître


Sous un pesant repos d’après-midi vermeil,
Les stalles, en vieux chêne éteint, sont alignées
Et le jour, traversant les fenêtres ignées,
Étale, au fond du chœur, des nattes de soleil.

Et les moines, dans leurs coules toutes les mêmes,
— Mêmes plis sur leur manche et mêmes sur leur froc,
Même raideur et même attitude de roc —
Sont là, debout, muets, plantés sur deux rangs blêmes.


Et l’on s’attend à voir ces immobilités
Brusquement se disjoindre et les versets chantés
Rompre, à tonnantes voix, les silences qui pèsent ;

Mais rien ne bouge au long du mur pâle qui fuit
Et les heures s’en vont par le couvent, sans bruit,
Et toujours et toujours les grands moines se taisent.

(LES MOINES).