Critique de la raison pure (trad. Barni)/Tome II/Appendice/A./S3/Idée


Idée sommaire de l’exactitude et de l’unique possibilité de cette déduction des concepts purs de l’entendement


Si les objets auxquels notre connaissance a affaire étaient des choses en soi, nous n’en pourrions avoir de concepts à priori. D’où en effet les tirerions-nous ? Si nous les tirions de l’objet (sans chercher ici comment cet objet pourrait nous être connu), nos concepts seraient purement empiriques et ne seraient pas des concepts à priori. Si nous les tirions de nous-mêmes, ce qui est simplement en nous ne saurait déterminer la nature d’un objet distinct de nos représentations, c’est-à-dire être une raison pourquoi, au lieu que toutes ces représentations fussent vides, il devrait y avoir une chose à laquelle convint ce que nous avons dans l’esprit. Au contraire, si nous n’avons partout affaire qu’à des phénomènes, il n’est pas seulement possible, mais il est nécessaire aussi que certains concepts à priori précèdent la connaissance empirique des objets. En effet comme phénomènes ils constituent un objet qui est simplement en nous, puisqu’une simple modification de notre sensibilité ne se rencontre pas hors de nous. Or cette représentation même exprime que tous ces phénomènes, par conséquent tous les objets dont nous pouvons nous occuper, sont en moi, ou sont des déterminations de mon moi identique, c’est-à-dire d’une complète unité de ces phénomènes dans une seule et même aperception nécessaire. Mais dans cette unité de la conscience possible réside aussi la forme de toute connaissance des objets (par où est pensé le divers comme appartenant à un objet). La manière dont le divers de la représentation sensible (de l’intuition) appartient à une conscience précède donc toute connaissance de l’objet, comme en étant la forme intellectuelle, et constitue elle-même une connaissance formelle de tous les objets à priori en général, en tant qu’ils sont pensés (les catégories). La synthèse de ces objets par l’imagination pure, l’unité de toutes les représentations par rapport à l’aperception originaire précède toute connaissance empirique. Les concepts purs de l’entendement ne sont donc possibles à priori, et même, par rapport à l’expérience, nécessaires, que parce que notre connaissance n’a affaire qu’a des phénomènes dont la possibilité réside en nous-mêmes, dont l’enchaînement et l’unité (dans la représentation d’un objet) ne se trouvent qu’en nous, et par conséquent doivent précéder l’expérience et la rendre d’abord possible quant à la forme. Et c’est ce principe, le seul possible entre tous, qui a dirigé toute notre déduction des catégories.




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Notes de Kant modifier


Notes du traducteur modifier