Cours d’agriculture (Rozier)/TANCHE


TANCHE, (Cyprinus tinca Lin.) poisson du genre des Carpes. (Consultez cet article.)

Caractères spécifiques : Vingt-cinq rayons à la nageoire anale ; celle de la queue entière ; le corps enduit à l’extérieur d’une mucosité visqueuse ; deux barbillons.

Ce poisson, également commun dans les rivières, les lacs et les étangs, n’atteint guères au delà de dix pouces de longueur. Sa tête est petite, à proportion du corps, qui est court et large. Sa bouche a peu d’ouverture, et chacune des mâchoires est armée de quatre dents larges et courtes. De petites écailles adhèrent fortement à la peau ; elles sont noires sur le dos, d’une teinte moins foncée sur les côtés, avec un mélange de vert jaunâtre, et blanchâtres sous le ventre. Les nageoires sont généralement d’un violet noirâtre ; mais toutes ces nuances sont sujettes à varier, suivant l’âge, le sexe du poisson, et les qualités de l’eau dans laquelle il vit. Plus les eaux sont fangeuses, plus la tanche est noire ; elle prend un jaune doré plus brillant, à mesure que les eaux coulent plus rapidement sur un fond de sable ou de cailloux. Le mâle est plus coloré que la femelle ; il est aussi plus petit, mais ses nageoires ont plus d’étendue.

Après la carpe, c’est la tanche qui intéresse le plus l’économie. On cherche à la multiplier dans les étangs, où elle se propage facilement. Il n’est point d’eaux stagnantes, de mares, de fossés, d’abreuvoirs même, où elle ne réussisse très-bien. Elle se plaît, de préférence, dans les eaux tranquilles et limoneuses, et elle passe l’hiver enfoncée dans la vase : de là vient que sa chair a presque toujours un goût de fange, si l’on n’a pas eu soin de faire dégorger ce poisson dans une eau claire quelques jours avant de l’apprêter. Il fournit alors un assez bon mets.

La tanche est beaucoup plus vorace que la carpe ; et, dans un étang où ces deux espèces sont mêlées, la première nuit à l’autre par la grande consommation qu’elle fait des substances qui servent à leur commune nourriture. Il passe pour constant qu’il faut plus de terrain pour nourrir cent tanches que pour entretenir cinq cents carpes. Il vaut mieux tenir les tanches à part ; et cela est d’autant plus aisé, qu’elles réussissent dans des amas d’eau où d’autres espèces ne pourroient subsister, ou ne feroient que languir. L’industrie de l’homme sait tirer parti de la gloutonnerie de la tanche ; s’il veut débarrasser les eaux des sangsues, qui font périr les jeunes canards et les oisons de sa basse-cour en s’attachant à leurs pattes, il y jette des tanches, dont ces vers deviennent bientôt la pâture.

Dans nos climats, le mois de juin est la saison marquée par la nature pour le frai des tanches. Les endroits les plus exposés au soleil, et les plus couverts de plantes aquatiques, sont ceux qu’elles choisissent pour déposer leurs œufs. À cette époque, elles sont meilleures à manger qu’en tout autre temps.

Pêche de la tanche. Diverses espèces de filets, et les hameçons servent à cette pêche. Les amorces que l’on y emploie avec le plus de fruit, sont les vers et les insectes. (S.)