Cours d’agriculture (Rozier)/SÉTON

Hôtel Serpente (Tome neuvièmep. 221-223).
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SÉTON. Médecine rurale. Opération par laquelle on passe, à l’aide d’une grande aiguille, ou de quelqu’autre instrument propre à cet usage, une bandelète de linge, qui sert à entretenir la communication entre deux plaies.

Le séton dérive du mot seta, parce que l’on se servoit des crins de cheval pour la même intention.

Heister nous apprend qu’il y a trois manières de faire le séton. Dans la première, on pince & on soulève avec les doigts la peau de la partie moyenne & postérieure du cou. Un aide en fait autant de l’autre côté à un pouce de distance, & ensuite il traverse cette portion de peau intermédiaire avec une grosse & large aiguille courbe, enfilée d’un cordonnet de fil, de soie ou de coton, d’une bandelette de linge longue & étroite, ou d’un petit ruban composé de vingt ou de trente fils de chanvre ou de coton un peu retors. Après cela on retire l’aiguille & on laisse les fils, ou le cordonnet, dans la peau du cou ; on oint avec un digestif les plaies qu’ont faites l’aiguille & le cordonnet, & l’on applique par-dessus un emplâtre fendu par les deux bouts, pour laisser passer le cordonnet, & l’opération est achevée.

Les autres deux méthodes de pratiquer le séton sont les mêmes, & ne différent que par l’instrument dont on se sert. Il y a eu, continue Heister, dans les siècles antérieurs, & il y a encore des médecins qui regardent le séton comme une opération inutile, & dont il ne peut jamais résulter le moindre avantage. Dionis, Garangeot, Mopilier, ont adopté cette opinion. Mais Barrichuis, Hildanus, Fabrice d’aqua pendente, Sevtrinus, Glandorp, Scultet, Wedelius, pensent bien différemment, & placent au contraire le séton au nombre des secours les plus puissans contre les maladies les plus rebelles de la tête ; & en effet le séton mérite la préférence sur les autres fonticules, dans l’hydrocéphale, dans les douleurs de tête invétérées, dans toutes les espèces de catarrhe opiniâtre, dans l’épilepsie, les maladies soporeuses & l’apoplexie, ainsi que dans les maladies des yeux les plus opiniâtres, telles que les ophtalmies violentes, & presque désespérées, la goutte sereine, & la cataracte commençante.

On voit par la vingt-cinquième observation de Scultet, qu’une goutte sereine, qui avoit résisté à sa saignée, à la purgation & aux cautères, fut guérie par le séton. Les éphémérides d’Allemagne attestent encore son efficacité contre les violentes ophtalmies.

Ruysch rapporte, dans une de ses observations, l’exemple d’une céphalalgie extrêmement opiniâtre que le déton faisoit disparoître, & qui revenoit toujours des qu’on en cessoit l’usage.

Fabrice de Hilden ne trouve aucun remède au-dessus du séton dans les fluxions catarrales, & il a guéri par ce moyen un grand nombre de phtisies commençantes, bien caractérisées par le crachement de sang & du pus.

Le séton a, sur le cautère & autres fonticules, l’avantage d’être fait dans le moment. La suppuration y est établie dès le second jour ; l’ulcère produit par le séton est tellement soumis à la volonté du chirurgien, qu’on l’entretient tant de temps que l’on veut, & qu’on le guérit de même en ôtant la bandelette. M. AMI.


Séton. (Médecine vétérinaire) Le séton est proprement un ulcère qu’on forme à la peau avec une aiguille, & que l’on entretient par le moyen d’un ruban long, graissé d’un médicament suppuratif.

Manière de pratiquer le séton. Faites à la peau du col, du poitrail, &c., un gros pli transversal ou oblique ; percez-le avec une aiguille longue & large, dans l’œil de laquelle vous aurez passé un ruban, ou une bande de toile douce, de la largeur d’un travers de doigt ; poussez le tranchant de l’aiguille, faites-la sortir par une ouverture opposée a son entrée, & en élevant chaque fois les tégumens, soit pour ne les point offenser avec la partie tranchante, soit pour ne pas plonger dans les muscles ; cela fait, faites un nœud aux deux extrémités du ruban ; tirez-le un peu pour le changer de place, & graissez-le chaque fois d’onguent basilicum, afin d’entretenir la suppuration.

Il y a encore une autre espèce de séton, qu’on appelle séton à l’angloise. La manière de l’appliquer est très-bien décrite par M. Huzard, dans l’article Eaux aux jambes de cet ouvrage, tom. IV, pag. 87. On en trouve aussi la description & la figure, ainsi que la manière de l’appliquer, dans le nouveau & savant Maréchal, traduit de l’anglois de Malkam, & dans le nouveau parfait Maréchal de M. de Gerfault.

Usage des sétons. De tous les moyens propres à corriger les fluides & les solides, de ce qui est la cause de inflammation & de la putridité, c’est sans contredit l’usage des sétons. En Angleterre, & dans les colonies angloises de L’Amérique Septentrionale, c’est une pratique générale que de faire des sétons sous le ventre des chevaux & des bœufs, lorsqu’ils sont malades, ou lorsqu’ils ont été exposés à de grandes fatigues. Presque tous les vétérinaires anciens & modernes ont assuré qu’ils n’avoient point trouvé de plus sûr moyen, après avoir tenté tous les remèdes, pour évacuer les humeurs âcres, & garantir le bétail des maladies épizootiques. En effet, quel moyen plus propre à laisser filtrer continuellement hors du corps les sérosités surabondantes, qui sont les plus viciées & les plus funestes au sang ? N’est-il pas prouvé par une expérience journalière, que les sérosités accourent au séton si abondamment, que quelquefois dans moins de vingt-quatre heures, il s’écoule une grande quantité d’une mucosité jaunâtre & très-fétide ? Y a-t-il une révolution plus propre pour prévenir les engorgemens, & pour détourner la rapidité du cours du sang vers le cerveau ? N’est-ce pas le viscère, de même que tous les antres, qu’on doit chercher de garantir le plus des dépôts qui s’y forment dans les maladies inflammatoires & putrides ? Concluons dons de tout ceci, qu’on ne sauroit faire le séton assez tôt, & qu’on doit soumettre l’animal à cette opération, dès qu’on s’aperçoit de la maladie. M T.