Cours d’agriculture (Rozier)/PERVENCHE

Hôtel Serpente (Tome septièmep. 598-600).


PERVENCHE. (La grande) Voyez Pl. XIX, p. 591. Tournefort la place dans la première section de la seconde classe des herbes à fleur d’une seule pièce en entonnoir, & dont le pistil devient le fruit ; & il l’appelle pervinca vulgaris latifolia, flore cœruleo. Von-Linné la nomme vinca major, & la classe dans la pentandrie monogynie.

Fleur. Chacune forme un tube B, plus long que le calice, évasé à son extrémité, & divisé en cinq parties larges & ovales. La corolle semble doublée depuis l’origine des divisions jusqu’à la base du tube. C représente la corolle ouverte ; on voit dans la corolle ouverte les cinq étamines égales & attachées à la même hauteur au tube de la corolle. Le calice est représenté ouvert en D, il est d’une seule pièce, divisé en cinq dents longues & étroites ; il est représenté en entier en E, le pistil F est placé au centre. La fleur est d’un joli bleu.

Fruit G ; deux siliques cylindriques, à une seule valvule, qui renferment des semences H oblongues, presque cylindriques, sillonnées ; elles avortent presque toujours.

Feuilles ; ovales, larges, luisantes, soutenues par de longs pétioles.

Racine A ; fibreuse, traçante.

Port. Les tiges s’élèvent à peu près à la hauteur des deux pieds, longues, rondes, nouées, vertes, flexibles ; les fleurs naissent des aisselles des feuilles attachées à de courts pédoncules ; les feuilles sont opposées deux deux le long des tiges.

Lieu ; les bois ; la plante est vivace, elle fleurit au premier printemps.


Pervenche. (Petite) Elle diffère de la première par ses tiges rampantes ; par ses fleurs plus petites, & portées sur de longs pédoncules ; par ses feuilles ovales, en forme de lance, & attachées à de courts pétioles ; enfin, par un plus grand épanouissement des filets des étamines. On la trouve communément dans les bois taillis.

Ces deux espèces très-distinctes ont produit un grand nombre de variétés, soit à fleurs plus ou moins colorées ou blanches, soit à feuilles panachées, plus larges ou plus étroites, &c.

Pervenche de Madagascar. Vinca rosea. Lin. Ce joli & intéressant petit arbuste, originaire de Java & de Madagascar, diffère des deux espèces précédentes par sa tige droite, ferme & cylindrique ; par les feuilles opposées, lancéolées & ovales, dures, terminées par une petite pointe blanche ; par leurs pétioles ayant une petite dentelure placée de chaque côté de la buse ; par les fleurs d’une jolie couleur rose, & sans pédoncules ; les inférieures sont isolées, les fleurs un peu plus élevées, sont deux à eux, ou quatre à quatre, ou huit à huit, de manière qu’il est difficile de compter leur nombre au sommet de l’arbuste.

Culture. La première espèce aime l’ombre des arbres, & demande à être placée dans les bosquets toujours verts, & la seconde figure très-agréablement lorsqu’on la plante dans les scissures des rochers, ou sur des plans inclinés, & aux pieds des arbres ; on les multiplie, ou par couchées, ou par drageons. M. Duhamel dit, que si l’on veut que la pervenche porte sa graine, on doit tenir cette plante dans un pot peu garni de terre. Il y a des pervenches à fleurs doubles.

La pervenche de Madagascar passe les hivers en pleine terre dans nos provinces méridionales ; il suffit de la garantir des gelées en l’entourant d’un peu de paille, & si elle est plantée dans un pot, de le renfermer dans une chambre ou dans une orangerie ; mais au nord du royaume, cet arbrisseau exige la serre chaude.

Dans les provinces du midi on sème la graine dans une terre douce, légère, & contre un bon abri ; au septentrion on la sème sur couche, sous cloche, & encore mieux sur couche placée tous des châssis. (Cons. ces mots) Sarcler & arroser sont les seuls soins qu’elle exige. Lorsque les plants ont deux à trois pouces de hauteur, on les lève de terre, on les sépare, & chaque pied est planté dans son pot. Après que sa reprise est bien assurée, on le place dans une bonne exposition au soleil. Cette espèce graine très-facilement.

Propriétés. La petite pervenche est plus employée en médecine que la grande, & elle mérite cette préférence. Les feuilles n’ont point d’odeur, leur saveur est austère & amère, Elles sont vulnéraires, astringentes & fébrifuges ; elles produisent quelquefois des effets salutaires dans l’hémopthisie causée par un effort ; dans l’hémorragie utérine par pléthore & par blessure ; dans la diarrhée par foiblesse de l’estomac & des intestins. En gargarismes elles sont utiles dans l’angine inflammatoire pour la répercuter, & dans le relâchement scorbutique des gencives… On emploie la décoction en gargarisme, & on la coupe souvent avec du lait pour la rendre plus adoucissante.