Cours d’agriculture (Rozier)/LIS BLANC ou LIS COMMUN

Hôtel Serpente (Tome sixièmep. 290-293).


LIS BLANC ou LIS COMMUN. Von Linné le classe dans l’hexandrie monogynie, & le nomme lilium candidum. Tournefort l’appelle lilium album vulgare, & le place dans la quatrième section des herbes à fleur régulière en lis, composée de six pétales, & dont le pistil devient le fruit.

Fleur. Blanche & sans calice, en forme de cloche étroite à sa base, composée de six pétales droits, évasés, recourbés, & chaque pétale a un nectaire à sa base ; les étamines au nombre de six & un pistil.

Fruit. Capsule formée par le renflement du pistil, marquée de six sillons, à trois loges, à trois valvules, renfermant des semences plates, en recouvrement les unes sur les autres.

Feuilles. Éparses, simples, très entières ; celles qui partent des racines sont larges, longues & pointues ; celles des tiges plus étroites & plus petites, à mesure qu’elles approchent du sommet.

Racine. Bulbeuse & formée d’écailles appliquées les unes sur les autres.

Port. La tige s’élève depuis deux jusqu’à quatre pieds, suivant la nature du sol, du climat & de la culture ; cette tige est herbacée, feuillée, très-simple ; les fleurs naissent au sommet, & elles ont une ou deux stipules au bas de chaque pédoncule.

Lieu. La Palestine, la Syrie, cultivé dans nos jardins, où il n’est pas sensible aux froids ; il fleurit en juin, juillet & août, suivant le climat.

Culture. Cette plante est tellement devenue indigène en France, qu’elle n’exige aucun soin particulier ; elle demande tout au plus que la plate-bande dans laquelle elle est plantée, soit travaillée au printemps, & débarrassée des mauvaises herbes. Cependant une bonne culture & un bon sol augmentent la hauteur de sa tige & le volume de ses fleurs. J’ignore s’il existe des lis blancs à fleurs doubles ; je n’en ai jamais vu.

On peut multiplier ce lis par les semences, mais cette voie est longue ; il est plus simple de se servir des caïeux, qui sont en très-grand nombre ; une seule écaille, mise en terre & soignée, produira dans la suite un oignon parfait. Le temps convenable à la séparation des caïeux, est marqué par le dessèchement complet des tiges & des feuilles ; les amateurs font cette opération tous les trois ans. L’habitant des campagnes laisse l’oignon livré à lui-même, ne le défilante jamais, & il en sort des masses de tiges. Le lis s’accommode assez bien de toutes sortes de terreins : on dit, & je ne l’ai pas éprouvé, qu’en plantant les oignons à différentes profondeurs, on avance ou l’on retarde leur fleuraison. Les lis sont très-bien dans les grandes plates-bandes des jardins ; leurs fleurs, le grouppe des feuilles & des tiges sont très-parans.

On a cherché en vain à donner artificiellement une autre couleur aux fleurs du lis, soit par des arrosemens d’eau colorée, soit en plaçant des couleurs sous l’écorce des tiges. Nous ignorons quels sont les moyens que la nature a pour décorer d’un blanc éclatant, le lys ; d’un jaune agréable, la jonquille ; d’un bleu ravissant, le bluet, &c. Laissons-là agir, elle est bien au-dessus de l’art, & toutes ses opérations sont merveilleuses, & manifestent la sagesse de celui qui a donné la vie à l’univers

Propriétés médicinales. La racine est onctueuse & grasse ; l’odeur de la fleur est agréable, mais forte, souvent très-nuisible dans les appartemens, & sur-tout dans la chambre où l’on couche, dont elle vicie l’air qu’elle rend méphitique. La racine est maturative & anodine ; les fleurs anodines & échauffantes.

Usages. L’oignon broyé ou cuit avec la mie de pain, accélère la maturité des abscès, & change en abscès une tumeur inflammatoire. L’oignon cuit sous les cendres chaudes, & mis ensuite, depuis demi-once jusqu’à deux onces, en macération dans cinq onces d’eau ou de vin blanc, est un urinaire actif ; il est employé utilement dans l’hydropisie de poitrine, & dans l’asthme pituiteux.

On fait beaucoup de cas de l’huile dans laquelle on a fait macérer des fleurs de lis : l’huile seule nouvelle, ou bonne, produiroit le même effet. L’eau distillée des fleurs est presque entièrement semblable à l’eau de rivière : son efficacité ne vaut pas la peine qu’on employe à cette opération. Cette eau est réputée cosmétique, c’est-à-dire propre à adoucir & à embellir la peau ; on ajoute même qu’elle dissipe les rides & les signes de la vieillesse. Si cette assertion étoit vraie, on verroit des champs entiers plantés en lis.


Le Lis Bulbeux, ou Lis Jaune. Lilium bulbiserum. Lin. Il diffère du premier, par la couleur jaune de sa fleur, par la disposition de ses pétales qui sont droits, & non pas lissés en-dedans ; mais sur-tout par ses tiges. On voit aux aisselles des feuilles, aux pédoncules des fleurs, de petites bulbes qui s’ouvrent en-dessus par écailles. Ils sont noirs quand ils sont mûrs, tombent & prennent racine en terre. On peut facilement multiplier cette espèce par ces bulbes, qui, étant secs, ont une odeur de violette. La culture de cette espèce n’est pas plus difficile que celle de la précédente ; mais elle a fourni un grand nombre de variétés, dont voici les principales.

Le lis bulbeux à fleurs d’un pourpre jaune.

Le même & la même couleur, à fleurs doubles.

Le même, à fleurs plus petites.

Le même, à fleurs blanches.

Le lis bulbeux est indigène en Sibérie, en Autriche & en Italie.


lis de Pompone, ou Lis rouge, ou Le Rouge vermeil. Lilium Pomponium. Lin. Son caractère est d’avoir les feuilles éparses, linéaires, aiguës, à trois côtés, formant une espèce de gouttière ; ses fleurs réfléchies, & ses pétales roulés, & comme peints avec du vermillon. Il a fourni deux variétés principales, celui à odeur & celui à feuilles courtes & graminées. Cette plante qui fleurit plutôt que les autres lis, produit un joli effet. Elle est, ainsi que ses variétés, originaire de la Sibérie & des Pyrennées, & supporte difficilement les fortes chaleurs des provinces du midi.


Lis de Calcédoine. Lilium calcedonicum. Lin. Feuilles éparses, en forme de fer de lance la tige est recouverte de feuilles jusqu’au sommet ; les fleurs sont renversées contre terre, & leurs pétales roulés. Cette plante varie suivant les lieux ; la tige ne porte quelquefois qu’une seule fleur, & l’onglet qui réunit ses pétales est souvent velu. Elle est originaire de Calcédoine. La plante ne craint pas les rigueurs de l’hiver des provinces méridionales ; elle fournit deux variétés : dans l’une la tige porte plusieurs fleurs, & dans l’autre, la couleur des fleurs est d’un pourpre sanguin.


Lis Superbe. Lilium superbum. Lin. Il est originaire de l’Amérique septentrionale. Ses feuilles sont éparses sur la tige, lancéolées, étroites, pointues. Du même point du sommet de la tige, qui s’élève quelquefois à six pieds de hauteur, partent les pédoncules des fleurs qui semblent rendre la tige rameuse ; les fleurs s’inclinent contre terre, & leurs pétales sont roulés. Cette plante n’exige pas plus de culture que le lis blanc, & elle fait l’ornement des jardins.


Lis Martagon. Lilium marcagon. Lin. Il diffère des autres lis par sa racine bulbeuse, qui est jaunâtre ; sa tige cylindrique, lisse, & souvent parsemée de points rouges ; ses feuilles sont rangées tout autour de la tige comme les rayons d’une roue le sont contre l’essieu, & elles sont à deux rangs, chaque rang composé de six à sept feuilles. Au haut de la tige naissent les fleurs, portées sur de longs pédoncules ; les pétales de la fleur sont purpurins, tachetés de rouge ; les étamines sont de la longueur du pistil ; à la base de chaque péduncule on remarque deux feuilles florales, l’une plus grande, & l’autre plus petite. Dans les parties inférieures, la feuille florale la plus grande, est à gauche, & à droite dans les supérieures. On le trouve dans la Hongrie, la Suisse, la Sibérie.

Toutes espèces de lis ornent très-bien un jardin ; on peut même en garnir les lisières des bosquets ; mais elles doivent y être plantées sans ordre, afin qu’elles aient l’air d’être naturelles au sol. Ce que je dis des bosquets, s’applique également aux bordures des prairies, &c.

Il seroit à désirer qu’on pût encore multiplier dans les jardins le lis du Canada, à fleurs jaunes, parsemées de taches noires ; celui de Philadelphie, à fleurs droites, & à feuilles verticillées comme celui du Canada, & du Camschatca, à fleurs pourpres, à tige cylindrique, lisse, haute d’un pied.


Lis des valées. (Voyez Muguet)


Lis des Étangs. (Voyez Nenuphard)