Cours d’agriculture (Rozier)/LADRERIE

Hôtel Serpente (Tome sixièmep. 150-151).


LADRERIE. Médecine Vétérinaire. La ladrerie est une maladie familière aux cochons domestiques : elle a beaucoup de rapport avec la lèpre de l’homme. C’est sans doute pour cette raison que Moïse en défendit autrefois l’usage à son peuple.

Symptômes. Les tégumens sont insensibles, l’animal se remue avec peine, & paroît triste ; les bords & la partie inférieure de la langue, quelquefois le palais, sont chargés de petits grains & de tubercules blanchâtres, rarement noirâtres, souvent remplis d’une humeur épaisse. Lorsque la maladie est avancée, la racine des poils est pour l’ordinaire ensanglantée, l’animal se soutient à peine sur le train de derrière. Nous avons vu des cas où cette maladie ne se connoissoit qu’après avoir égorgé l’animal, & l’avoir mis en pièces. Alors nous avons trouvé le tissu cellulaire des muscles, parsemé de grains blanchâtres.

Causes. La ladrerie vient ordinairement de la malpropreté où on abandonne le cochon, & de la corruption des substances infectes dont il a coutume de se nourrir. Voilà pourquoi le sanglier n’est point sujet à cette maladie ; cette espèce de cochon sauvage ne se remplissant point de semblables ordures, & vivant communément de grains, de fruits, de glands & de racines. Voilà pourquoi aussi le jeune cochon domestique n’y est point exposé, tant qu’il tette.

L’expérience prouve que cette maladie n’est point contagieuse, & qu’elle ne se communique pas d’un porc malade à un porc sain. Elle est très difficile à guérir dans le commencement, & lorsqu’elle est parvenue vers son dernier degré d’accroissement, elle est incurable.

Traitement. Pour guérir l’animal dans le principe de la maladie, mettez-le sous un hangar exactement pavé, propre & bien aéré : étrillez-le deux fois par jour ; faites-le baigner tous les jours dans une eau courante & pure ; au sortir du bain, bouchonnez-le exactement, ensuite ramenez-le à l’étable, où vous changerez de litière deux fois par jour ; faites-le promener une heure le matin, autant le soir, sans lui permettre de manger aucune substance infecte ; nourrissez-le de grains de froment, & de son humecté d’eau aiguisée de sel de nître ; tenez-le à cette nourriture, mais à une dose modérée, & dans des temps réglés. Prenez de fleur de souffre trois onces ; de son environ une livre ; mêlez exactement, & humectez le mélange avec de l’eau simple ; réitérez ce breuvage tous les jours à jeun, pendant l’espace d’un mois, ou environ ; parfumez le malade une fois le matin, autant le soir, avec les vapeurs de deux parties de souffre & d’une partie d’encens ; donnez tous les jours avec le grain de froment, la racine de patience pulvérisée, à la dose de quatre onces. M. Vitet conseille ce dernier remède ; quelques-autres auteurs ont proposé l’usage interne des préparations mercurielles & antimoniures ; mais dans ce cas, la chair de l’animal est très suspecte. M. T.