Cours d’agriculture (Rozier)/GLAND

Hôtel Serpente (Tome cinquièmep. 308-309).
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GLAND. Fruit de l’arbre nommé chêne. (Voyez ce mot). La récolte de ce fruit est appelée glandée. En général, les années fertiles en pommes, le sont en glands, parce que la récolte de la fleur de l’un tient à la réussite de l’autre : cependant les glands manquent souvent, ou par abondance des pluies à l’époque de la fleuraison, ou par la sécheresse de l’été, ou enfin par la multiplicité d’insectes qui s’attachent & s’insinuent dans le gland. L’abondance ou la disette de ce fruit influe singulièrement dans plusieurs de nos provinces sur le prix des cochons, des dindes & de la volaille. On récolte le gland, ou pour le service de la basse-cour, ou pour les semis ; & dans les pays très-pauvres, on récolte, pour nourrir les hommes, celui du chêne, N°. 8, (voyez ce mot) & même quelquefois ceux des chênes verts, parce qu’ils sont moins âcres, moins austères que les autres.

On ne doit point ramasser pour les semis les premiers glands tombés de l’arbre ; leur chute a été accélérée par la piqûre des insectes. On attendra un beau jour dans le mois d’octobre ou de novembre, suivant les climats, & on choisira un à un ceux que l’on désire conserver. Il faut donner la préférence aux plus luisans & aux plus pesans ; les plus gros ne sont pas toujours les meilleurs. On les portera tout de suite dans un lieu frais & non pas humide, où on les rangera lit par lit avec du sable : ils demeureront dans cet état jusqu’au moment de les semer. Si les glands, ainsi disposés, ont germé ; ce qui arrive assez-souvent, on évitera avec grand soin, en les tirant du sable, ou en les transportant sur le lieu du semis, de ne point froisser, endommager ou rompre ce germe ou radicule. Il est possible, absolument parlant, de ne pas prendre ce soin : on peut amonceler les glands dans la forêt ou près du terrain préparé pour le semis, & les y laisser jusqu’en mars ; mais il est à craindre que l’abondance des pluies ou d’humidité en fasse pourrir une grande partie, ou que les gelées en détruisent beaucoup.

Quant aux glands destinés à la nourriture des animaux de la basse cour, ils exigent les mêmes soins que les châtaignes qu’on veut conserver. (Voyez ce mot). Les métayers prévoyans conservent le gland d’une année à l’autre, lorsque la récolte est très-abondante ; & si la suivante vient à manquer, ils sont alors assurés d’un très-gros bénéfice, soit par la vente des glands surnuméraires, soit par celle des cochons & des volailles, dont le prix est augmenté sans qu’ils aient plus dépensé pour leur nourriture. Le moyen qu’ils emploient, consiste à dessécher les glands à la chaleur du four, d’abord lente, & ensuite assez forte pour les priver de leur eau de végétation. Le second moyen, moins sûr que le premier, est de les ramasser par un temps beau & sec, de les laisser exposés dans un lieu à couvert de la pluie & du soleil, mais à un très-grand courant d’air, où ils les remuent souvent ; enfin, ils les amoncèlent, les couvrent de paille : ils n’y touchent plus jusqu’à l’année suivante.