Cours d’agriculture (Rozier)/CAPUCINE

Hôtel Serpente (Tome secondp. 558-559).


CAPUCINE, ou Cresson d’Inde ou du Pérou. M. Tournefort la place dans la seconde section de la onzième classe, qui comprend les herbes à fleur de plusieurs pièces irrégulières, dont le pistil devient un fruit à plusieurs loges, & il l’appelle cardamindum ampliori folio & majori flore. M. von Linné la nomme Tropælum majus, & la classe dans l’octandrie monogynie.

Fleur, composée de cinq pétales inégaux, les deux supérieurs plus grands, les inférieurs barbus près de leurs onglets. Le calice d’une seule pièce, coloré, divisé en cinq découpures, se prolongeant en arrière, formant un nectar en forme d’alène plus long que le calice.

Fruit. Trois baies solides, convexes d’un côté, sillonnées & anguleuses de l’autre ; chaque baie renferme une semence à peu près semblable.

Feuilles, soutenues par de longs pétioles, faites en rondache, comme divisées en trois lobes, planes, unies, entières.

Racine, fibreuse.

Port. Tiges herbacées, pliantes, s’élevant contre les supports qu’on lui présente, & s’y attachant par ses feuilles.

Les fleurs sont solitaires ; une des trois semences avorte ; les feuilles sont placées alternativement sur les tiges.

Lieu. Originaire du Mexique où elle est vivace. Elle en fut apportée en 1684 ; fleurit tout l’été. Cette plante est également vivace en France, si on la préserve des gelées.

Propriétés. Toute la plante est âcre & piquante ; la fleur est odoriférante : on la regarde comme un excellent détersif ; elle est résolutive, diurétique, antiscorbutique.

Culture. On la sème ou dans des caisses pour être replantée, ou sur place. Cette dernière manière est préférable, surtout dans les pays où l’on craint peu les gelées tardives. Si on la sème en place, il convient de préparer, 1o des creux d’un pied de profondeur, de les remplir de bonne terre mêlée avec beaucoup de fumier, ou de faire des tranchées de la même profondeur sur la même largeur. 2o. Arroser fréquemment, & ne pas inonder dès que la plante commence à avoir quelques pouces de hauteur. 3o. Lui donner de bonne heure des tuteurs comme aux pois. Plus il fera chaud, plus il faudra souvent arroser, & les tiges s’éleveront alors sur la ramée à la hauteur de six à huit pieds.

Si on sème dans des caisses, dès que la plante aura quatre ou six feuilles, elle est en état d’être replantée ; elle reprend très-facilement en l’arrosant un peu.

Si on sème pour décoration, il convient de choisir la graine de capucine à fleur large & bien veloutée. Si on sème au contraire pour récolter le bouton avant l’épanouissement de la fleur, on doit choisir la capucine à petite fleur & à fleur jaune, parce que ses boutons sont plus multipliés que ceux de la première.

La capucine peut se multiplier de boutures. À cet effet on choisit l’extrémité des branches les plus vigoureuses ; & après en avoir coupé la longueur de quelques pouces, on la plante dans du terreau bien consommé. Il faut arroser légérement, tenir la bouture au grand air, & non au soleil.

Les curieux cultivent une capucine à fleur double qui, ne donnant point de graine, ne peut se multiplier que par boutures. Si la gelée la touche, elle périt. Pour la conserver, la serre chaude est nécessaire ; elle craint beaucoup l’humidité.

Il faut, chaque jour, faire la cueillette des boutons, & rejeter soigneusement ceux qui commencent à se colorer en jaune ; ils ne sont plus aussi bons pour confire.

Les boutons de capucine, confits au vinaigre, tiennent lieu de câpres, & ils sont plus parfumés. On jette ces boutons dans du bon vinaigre ; ils doivent y tremper, de sorte qu’à mesure que le nombre des boutons augmente, on doit ajouter de nouveau vinaigre ; par ce moyen, on n’est pas obligé de changer celui-ci. Les vases destinés à cette préparation journalière, n’exigent pas d’être couverts, sinon avec une toile, une planche seulement, pour empêcher les ordures d’y pénétrer. Le vinaigre devient de plus en plus acide & fort par sa communication avec l’air atmosphérique. Des auteurs recommandent de laisser pendant plusieurs heures les boutons nouvellement cueillis se flétrir à l’ombre ; cette précaution est très-inutile. D’autres exigent de changer le vinaigre tous les huit jours ; si le premier vinaigre est bon, c’est une opération superflue. L’addition du sel, du poivre, &c. quoique également prescrite, est dans le même cas.