Cours d’agriculture (Rozier)/BENOITTE

Hôtel Serpente (Tome secondp. 199-200).
◄  BENNE
BEQUÈNE  ►


BENOITTE, ou Galiote, ou Herbe de Saint Benoit. (Pl. 6, pag. 197) Elle tire son nom de benedicta ou herbe bénite, à cause des grandes propriétés qui lui ont été attribuées par les auteurs anciens. M. Tournefort la place dans la septième section de la sixième classe, qui comprend les herbes à fleur de plusieurs pièces régulières, en forme de rose, dont le pistil devient un fruit composé de plusieurs semences disposées en manière de tête ; & il l’appelle, d’après Bauhin, caryophyllata vulgaris. M. Linné la classe dans la polyandrie polyginie, & la nomme geum urbanum.

Fleur, composée de cinq pétales B, disposés en rose, de la grandeur du calice D, d’une seule pièce, mais découpée en cinq parties aiguës. Les étamines sont au nombre de vingt ; elles entourent un pistil formé par soixante ovaires, qui forment le fruit E. En C, on voit le calice avec les ovaires.

Fruit E. Les ovaires deviennent autant de capsules qui renferment des semences rondes, armées de pointes longues, nues, courbées en hameçon.

Feuilles ; les unes partent immédiatement de la racine, & les autres des tiges. Les inférieures sont portées par de longs pétioles, & communément au nombre de cinq ou de sept ; celles d’en-bas très-petites, & les trois du sommet rapprochées, mais séparées entr’elles, quoique la gravure les représente réunies. Celles des tiges sont moins volumineuses ; celles du sommet n’ont point de pétioles, & sont divisées en trois lobes. Toutes sont découpées en manière de scie dans leurs contours.

Racine A, pivotante, fibreuse, roussâtre.

Port. Tiges d’un pied de haut, velues, branchues ; les rameaux sont alternativement placés ; des fleurs jaunes naissent au sommet.

Lieu. Les terrains ombrageux & humides. La plante est vivace, & fleurit en Juin & Juillet.

Propriétés. La racine de cette plante est d’une odeur agréable, quoiqu’assez forte ; le goût en est âcre & amer : elle est astringente, sudorifique, cordiale, & M. Chomel la vante beaucoup comme fébrifuge.

Usages. On se sert, pour l’homme, de la racine cueillie au printems. La décoction de la racine fraîche le donne à la dose d’une once, ou d’une poignée de la plante infusée dans une livre d’eau. La dose de la racine, réduite en poudre, à une drachme dans du vin, & elle résout le sang extravasé à la suite des chûtes ; ce que produit aussi le suc des feuilles donné à la dose de trois onces. Aux animaux, on donne la décoction de toute la plante, à la dose d’une forte poignée dans une livre d’eau, & la poudre des racines, depuis demi-once jusqu’à une once. On tire de cette racine un extrait utile dans le crachement de sang, dans la diarrhée, dans la dyssenterie, & dans les pertes des femmes. Tel est, en général, ce qui a été dit sur les propriétés & les usages de la benoite. Mais de combien ne faudra-t-il pas rabattre de ces propriétés, si on consulte la Pharmacopée de Lyon, publiée par M. Vitet ? « Les feuilles, dit-il, fortifient peu l’estomac & les intestins ; elles sont rarement utiles dans la diarrhée avec foiblesse de l’estomac, & sur la fin de la dyssenterie bénigne ; elles ne remédient point à la suppression du flux menstruel, par l’impression des corps froids ; à la suppression des lochies, par l’action d’un corps froid ; elles favorisent peu la suppression des hémorragies internes, & il est très-douteux que la racine soit indiquée dans ces espèces de maladies. » À qui faut-il en croire ?