Cours d’agriculture (Rozier)/BASILIC

Hôtel Serpente (Tome secondp. 167-170).


BASILIC. M. Tournefort le place dans la troisième section de la classe quatrième qui comprend les herbes à fleurs d’une seule pièce & labiée, dont la lèvre supérieure est retroussée, & il l’appelle, d’après Bauhin, ocimum vulgatius. M. le chevalier von Linné le classe dans la didynamie gymnospermie, & le nomme ocimum basilicum.

Fleur, labiée ; son tube est court & large ; la lèvre supérieure plus grande que l’inférieure ; celle-ci frisée & légérement crénelée ; l’une fendue en quatre & l’autre entière.

Fruit. Quatre semences, oblongues, noirâtres, dans un calice renfermé, très-court.

Feuilles, ovales, lisses, simples, entières, portées sur des pétioles.

Racine, ligneuse, fibreuse brune.

Port. Une tige principale de laquelle partent de petites branches touffues ; elle s’élève de six à dix pouces de hauteur ; les fleurs sont épis verticillés ; deux feuilles florales au-dessous des bouquets ; les feuilles opposées.

Lieu. Les Indes ; cultivé dans tous les jardins ; fleurit en Juillet & Août ; la plante est annuelle.

II. De ses espèces. L’espèce des botanistes, qui vient d’être décrite, a fourni les espèces jardinières suivantes : 1o. le basilic à larges feuilles ; 2o. à feuilles crépues ; 3o. à feuilles d’un verd brun, & grandes ; 4o. à feuilles panachées comme celles de la crette de coq, ou amaranthe, ou simplement d’un rouge vineux ; 5o. une autre espèce très-verte à petites feuilles. Telles sont les espèces communément cultivées dans les jardins des particuliers. On voit dans ceux des curieux :

1o. Le basilic vivace, originaire d’Asie, dont les tiges sont ligneuses, simples, presque carrées, & qui s’élèvent presqu’à la hauteur de trois pieds ; les feuilles sont ovales, alongées, dentées en manière de scie ; en dessous rudes au toucher ; quelques-uns des rameaux naissent au sommet ; ils sont cylindriques, les fleurs blanches, au nombre de six ensemble, mais disposées autour du rameau ; son odeur est très-agréable. Clarici, dans son Istoria ecoltura delle piantœ, dit qu’il en a vu plus de trente espèces bien distinctes. M. Tournefort en distingue vingt espèces, dont la plupart sont des espèces jardinières.

2o. Le basilic très-petit. Ses feuilles sont très-entières & blanchâtres.

3o. Le basilic à très-petite fleur. Il est originaire du Malabar ; sa tige s’élève à la hauteur de douze à dix-huit pouces ; elle est cylindrique, rougeâtre, branchue, couverte de poils ; ses rameaux sont courts ; ses feuilles sont ovales, oblongues, à dentelures arrondies, portées sur de longs pétioles ; les épis terminent les tiges ; les feuilles florales, opposées, lisses, en forme de cœur recourbé ; les fleurs, au nombre de trois, renfermées dans chaque feuille florale ; leur corolle est petite, d’un rouge pourpre, la lèvre supérieure est divisée en quatre, & l’inférieure est simple. Les fleurs sont si petites qu’à peine les apperçoit-on sans le secours de la loupe.

Les botanistes en reconnoissent plusieurs autres espèces.

III. De sa culture. On peut semer le basilic depuis le mois de Février jusqu’au commencement de Juillet, sur-tout dans les provinces méridionales ; cependant ceux de Février & de Mars exigent des couches, & d’être garantis par des paillassons pendant les matinées, les nuits & les jours froids. Dans les provinces du nord les châssis (voyez ce mot) sont indispensables. Si on attend le mois de Mars dans les pays chauds, ou les mois d’Avril ou de Mai dans le nord, on ne risque pas de le semer en pleine terre ou dans des pots. Cette seconde méthode est préférable ; il est plus facile de les soigner & de les garantir des matinées froides ; la terre ne sauroit être trop atténuée & trop substantielle. On peut semer épais. Lorsque la jeune plante a poussé six feuilles, on la replante, & elle reste en terre jusqu’à ce qu’elle ait commencé à former sa tête & donné une certaine masse de racines ; c’est alors le cas de la replanter à demeure. Si on a semé en pleine terre & clair, ces replantations sont inutiles.

Il est bon de semer à des tems différens ; par exemple, tous les quinze jours : si un semis a manqué, sa perte est réparée par le semis suivant, & de cette manière on est assuré d’avoir de beaux pieds de basilic jusqu’aux premières gelées. Pline dit quelque chose de bien puéril, chapitre premier, liv. 19. Nihil ocymo secundius cum maledictis & probris serendum prœcipiunt ut cœlerius proveniat.

Arroser sur le champ le basilic replanté, & le garantir pendant quelques jours de l’impression du soleil, surtout dans les pays chauds, sont deux précautions essentielles. Comme cette plante pousse beaucoup de petites racines, de petits chevelus, elle épuise bientôt l’humidité de la terre qui l’environne ; dès-lors, de fréquens & abondans arrosemens sont nécessaires ; il importe peu que ce soit le soir ou le matin ou pendant le jour, pourvu que le pied ait une humidité proportionnée à l’évaporation qui se fait & qui s’est faite pendant le jour. Trop d’eau seroit aussi nuisible que pas assez.

En replantant il faut conserver la terre autour des racines, autant qu’on le peut ; le tirefleur est utile dans cette circonstance ; plus on ménagera la terre & les racines, plus la reprise sera facile. Si on choisit pour cette opération un jour un peu pluvieux & couvert, la réussite est assurée. Lorsque la tête de la plante commence à se former, c’est le tems de replanter.

Dans les parterres, dans les jardins des provinces méridionales, où la verdure est assez rare pendant l’été, le basilic offre une ressource précieuse. Il faut planter chaque pied à dix pouces l’un de l’autre, le tailler sur les côtés de l’allée & par-dessus ; alors tous les pieds poussant en même tems leurs rameaux, ils se touchent & forment un tapis de verdure très-agréable. Si on ne taille pas le basilic en dessus, il forme alors une tête ronde & agréable à la vue. Si on veut conserver pendant long-tems des basilics dans des pots, ou en pleine terre, il suffit de leur empêcher de porter fleur en les taillant.

Il faut laisser la plante sécher sur pied lorsqu’on la destine pour la graine ; on l’arrache de terre un peu avant sa dessication complète, dans la matinée, lorsque la rosée la couvre encore ; elle empêche que la graine, parfaitement mûre, n’échappe du calice qui la renfermoit. On porte les pieds dans un lieu aéré & sec, dans lequel les plantes restent suspendues pendant quelques jours, & on les bat ensuite pour en avoir la graine. On peut même les laisser sur la tige jusqu’à l’année suivante, si ces tiges ne sont pas balotées par le vent. La graine est bonne pendant deux & même trois ans.

Le basilic que l’on destine aux emplois de la cuisine, veut être cueilli à l’époque de sa pleine fleur, & être mis à l’ombre & suspendu pour dessécher.

IV. De ses propriétés. Son odeur est aromatique ; son goût acre & amer. La plante est céphalique, emménagogue, diaphorétique, stomachique, sternutatoire ; elle est indiquée pour réveiller les forces vitales, dans les maladies de foiblesse, dans le vomissement produit par des matières séreuses ou pituiteuses. La dose des feuilles récentes est depuis deux drachmes jusqu’à une once, en infusion dans six onces d’eau ; celle des feuilles séches, depuis une drachme jusqu’à demi-once en infusion dans la même quantité d’eau. La poudre se prend comme celle du tabac.

Les abeilles aiment beaucoup cette plante, il seroit bon de la multiplier autour du rucher.