Cours d’agriculture (Rozier)/ANIS ÉTOILÉ

Hôtel Serpente (Tome premierp. 562-564).


Anis étoilé, ou Badiane. (Voyez Pl. 17, pag. 548) Il n’étoit connu en Europe que par son fruit, qu’on appeloit badiane des Indes, anis de Sibérie, anis de Chine, anis des Indes. M. Tournefort n’a jamais vu cette plante. M. le chevalier Von Linné n’en a parlé que d’après Kempfer, & l’a placée dans la dodécandrie dodécagynie ; il l’appelle illicium anisatum, qui est bien différent de l’illicium floridanum que nous allons décrire.

A, disposition des parties sexuelles ; B, ces mêmes parties vues de profil ; C, les nectaires en forme de tubes, convexes d’un côté, & sillonnés de l’autre D ; le filet des étamines, E ; le calice, F ; forme des pétales, G ; forme du fruit, H ; forme des graines, I.

Le calice est composé de cinq petites feuilles membraneuses, colorées, concaves, oblongues, & pointues à leur extrémité. Leur nombre n’est pas toujours constant. Les pétales ou feuilles de la fleur, au nombre de vingt-un à vingt-sept, sont de grandeur différente, suivant le cercle qu’ils occupent ; les extérieurs plus longs que ceux du second rang, & ceux-ci plus courts que ceux du troisième, qu’on avoit pris pour des nectaires, & qui sont représentés ainsi d’après les gravures de madame Regnault de Nangis. Les étamines au nombre de trente environ ; les filets en sont plats & courts, & les anthères sont surmontés de chaque côté d’une espèce de petite poche qui renferme la poussière fécondante. Les pistils, au moins au nombre de vingt, sont placés circulairement au dessus du réceptacle de la fleur ; leurs stiles pointus, recourbés en dehors à leur extrémité supérieure ; leurs stigmates sont recouverts d’un duvet.

Le fruit consiste en douze ou treize capsules. Leur substance est dure, & ressemble à du cuir desséché. Chaque capsule est composée de deux valvules qui renferment chacune une semence douce, luisante, & de figure ovale. Ces capsules sont disposées horizontalement & circulairement, comme les rayons d’une étoile.

Le premier échantillon desséché de cette plante, fut apporté à la reine Élisabeth ; & ce ne fut qu’en 1765, qu’un nègre la découvrit dans un terrain marécageux, près de Pensacola. M. Bartram, botaniste anglois, fit la même découverte sur les bords de la rivière de S. Jean, dans la Floride occidentale ; ce qui nous donne quelqu’espérance de la voir un jour cultivée en France, soit comme arbre d’agrément, soit à cause de son produit pour le commerce. L’arbre qui porte ce fruit est toujours verd, s’élève à la hauteur de vingt pieds, & fournit le plus agréable aromat connu.

Propriétés. Les chinois mâchent souvent les capsules des graines avant le repas pour se fortifier l’estomac & se parfumer la bouche ; & à leur exemple, les hollandois les mettent infuser avec leur thé, & le regardent alors comme un diurétique puissant.

Les japonois & les chinois regardent l’anis étoilé comme une plante sacrée ; ils l’offrent à leurs pagodes, en brûlent l’écorce comme un parfum sur leurs autels, & en placent des branches sur les tombeaux de leurs amis. Les indiens font infuser le fruit dans l’eau, la fermentation s’établit, & il en résulte une liqueur vineuse.

En Chine, les gardes publics pulvérisent l’écorce, la conservent dans de petites boîtes alongées en manière de tuyau. On met le feu à cette poudre par une des extrémités du tuyau ; mais comme elle se consume d’une manière uniforme & très-lentement, quand le feu est parvenu à une distance marquée, les gardes sonnent une cloche ; & par le moyen de cette espèce d’horloge pyrique, ils annoncent l’heure au public.