Correspondance de Voltaire/1773/Lettre 8790

Correspondance : année 1773GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 48 (p. 327-328).
8790. — À M. LEJEUNE DELACROIX,
avocat.
À Ferney, ce 22 mars.

J’ai reçu, monsieur, votre lettre lorsque j’échappais à peine, et pour très-peu de temps, d’une maladie qui n’épargne guère les gens de mon âge. Ainsi votre confrère M. Marchand[1] est plus en droit que jamais de faire mon testament ; mais vous êtes bien plus en droit de réfuter la calomnie qui vous a imputé un libelle contre M. de Morangiés et contre moi[2]. Je connais trop votre style, monsieur, pour m’y être mépris un moment. Il est vrai qu’on a voulu l’imiter, mais on n’en est pas venu à bout. Je vous ai toujours rendu justice ; et, quoique nous soyons d’avis très-différent sur le singulier procès de M. de Morangiés, mon estime pour vous n’en a jamais été altérée. Je me hâte de vous témoigner mes véritables sentiments, malgré la faiblesse extrême où je suis ; je serais trop fâché de mourir sans compter sur votre amitié, et sans vous assurer de la mienne.

C’est avec ces sentiments, monsieur, que j’ai l’honneur d’être votre très-humble et très-obéissant serviteur.

  1. Voyez tome XX, page 200.
  2. Voltaire l’avait cru l’auteur des Preuves démonstratives en fait de justice ; voyez la note, tome XXVIII, page 577 ; voyez aussi ci-dessus, page 318.