Correspondance de Voltaire/1771/Lettre 8168

Correspondance : année 1771GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 47 (p. 317-318).
8168. ‑ À M. BERTRAND.
À Ferney, 7 janvier.

Voici, monsieur, le temps de neige où je suis mort ; et je me soulève un peu de mon tombeau pour vous dire que c’est avec vous que je voudrais vivre.

Je fais une grande perte dans M. e duc et Mme la duchesse de Choiseul. On ne peut compter sur rien de ce qui dépend de la cour. Le premier homme de l’État n’est jamais sûr de coucher chez lui. Vous ne connaissez pas chez vous de pareils orages ; vous jouissez du moins d’une tranquillité assurée, et je tiens cette possession bien préférable aux autres.

On dit qu’il va paraître, en Pologne, quelque ombre de pacification. Cela vous intéresse : je vous crois toujours attaché au roi. Votre Pologne est assurément pire que la France ; non-seulement on ne couche pas chez soi dans ce pays-là, mais on y est tué sur le pas de sa porte.

Voici un petit ouvrage[1] que vous ne connaissez probablement pas, et que je vous envoie pour vos étrennes.

Je vous embrasse de tout mon cœur, et vous souhaite tout plein de bonnes années. V.

  1. C’est l’article Dieu ; voyez la note, tome XIX, pages 161-162.