Correspondance de Voltaire/1766/Lettre 6363

Correspondance : année 1766GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 44 (p. 306-307).
6363. — À M.  DAMILAVILLE.
13 juin.

Mon cher ami, en vous remerciant de prendre si généreusement le parti du président de Thou. Je crois que vous prendrez aussi le parti du livre attribué à Fréret[1]. Si ce livre est d’un capitaine au régiment du roi, comme on le dit, ce capitaine est assurément le plus savant officier de l’Europe, et en même temps le meilleur raisonneur. Il cite toujours à propos, et il prouve d’une manière invincible. Il est impossible que tant de bons ouvrages qu’on nous donne coup sur coup ne rendent les hommes plus sages et meilleurs.

Vous m’affligez beaucoup de m’apprendre que le gardien des capucins est un Othon et un Caton. Je me flattais que ses moines lui auraient coupé la gorge, et que cette aventure serait fort utile aux pauvres laïques.

Quant à Lally, je suis très-sûr qu’il n’était point traître, et qu’il était impossible qu’il sauvât Pondichéry.

Le parlement n’a pu le condamner à mort que pour concussion. Il serait donc à désirer qu’on eût spécifié de quelle espèce de concussion il était coupable. La France, encore une fois[2], est le seul pays où les arrêts ne soient point motivés[3], comme c’est aussi le seul où l’on achète le droit de juger les hommes.

Voici, mon cher ami, une lettre pour Protagoras.

Bonsoir, mon cher frère ; ma faiblesse augmente tous les jours, mais mes sentiments ne diminuent point. Écr. l’inf…

  1. Voyez lettre 6306.
  2. Il l’avait déjà dit dans la lettre 6358.
  3. Ils doivent l’être aujourd’hui, sous peine de nullité.