Correspondance de Voltaire/1762/Lettre 5086

Correspondance : année 1762GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 42 (p. 282-283).

5086. — À M. LE COMTE DE CHOISEUL[1].
Ferney, 10 novembre.

Monseigneur, comme tout ce que je pourrais avoir l’honneur de vous dire se trouve dans la lettre ci-jointe, qu’il ne faut pas plus multiplier les importunités que les êtres sans nécessité, et qu’à grand seigneur peu de paroles, daignez permettre que je vous supplie de lire ma lettre à mes anges.

M. et Mme d’Argental m’apprennent que vous avez bien voulu vous intéresser au rétablissement d’un ancien officier d’artillerie[2], qui a grande envie de tirer sur les Russes, Anglais, Hanovriens, Hessois, et Prussiens ; je n’ai pas osé vous solliciter, mais j’ose vous remercier : la reconnaissance enhardit.

Je jette avec douleur les yeux sur la terre et sur la mer, et sur le théâtre de Paris ; je vois que les Russes et l’Opéra-Comique feront du mal : je lève les yeux au ciel dans ma douleur profonde.

Je souhaite que nos grenadiers et nos marins vous donnent de beaux sujets d’ultimatum : car quand il s’agit d’un traité de paix, ce sont leurs sabres qui taillent vos plumes.

Vous connaissez, monseigneur, le respect infini du Suisse V., et sa discrétion qui l’empêche de vous fatiguer de ses inutiles lettres.

Ah ! j’apprends dans le moment que tout le monde vous bénit, monseigneur ; et moi, je vous remercie de m’avoir fait achever une Histoire générale qui finit par le bien que vous faites aux hommes.


Le vieil Ermite des Alpes.

  1. Voyez la note, tome XXXVII, page 479.
  2. Marchand de La Houlière ; voyez lettres 4857 et 4878.