Correspondance de Voltaire/1761/Lettre 4420

Correspondance : année 1761
Garnier (Œuvres complètes de Voltaire, tome 41p. 153-154).

4420. — À M. THIERIOT.
15 janvier.

Reçu une feuille du Censeur hebdomadaire[1], et l’Histoire de la Nièce d’Eschyle[2]. Je voudrais voir de quel poison se sert l’ami Frelon pour noircir le zèle, l’Ode et les soins de M. Le Brun. Comment sait-il que L’Écluse est venu dans notre maison ? et que peut-il dire de ce L’Écluse ? Il finira par s’attirer de méchantes affaires. Vous ne pouvez avoir encore le chant de la Capilotade. Il faut bien constater l’aventure de Grizel avant de le fourrer là.

J’ai voulu avoir le Recueil[3] H, parce que j’avais les précédents : voilà comme on s’enferre souvent.

Il n’y a pas moyen de vous faire tenir encore l’Épître à Mlle Clairon. Il faut attendre qu’elle se porte bien, qu’elle rejoue Tancrède, et que certaines gens approuvent les petites hardiesses de cette Épître. Je suis convaincu que l’acharnement de Fréron contre un homme du mérite de M. Diderot fera grand bien au Père de famille.

Vous demandez des détails sur mon triomphe de gente jesuitica : ce triomphe n’est qu’une ovation ; nul péril, nul sang répandu. Les jésuites s’étaient emparés du bien de MM. de Crassy[4], parce qu’ils croyaient ces gentilshommes trop pauvres pour rentrer dans leurs domaines. Je leur ai prêté de l’argent sans intérêt pour y rentrer ; les jésuites se sont soumis : l’affaire est faite. S’il y a quelque discussion, on fera un petit factum bien propre que vous lirez avec édification. Volà, mon ancien ami, tout ce que je peux vous mander pour le présent. Intérim, vale.

  1. Chaumeix éiait un des rédacteurs de ce journal.
  2. La petite Nièce d’Eschyle, histoire athénienne, traduite d’un manuscrit grec ; 1764, in-8°. — Cette petite brochure est attribuée par Barbier au chevalier Neufville-Montador.
  3. C’est-à-dire le tome huitième du recueil A, B, C, D ; Fontenoy (Paris), 1745-1762, vingt-quatre volumes in-12, dont les éditeurs furent Perau, Mercier de Saint-Léger, etc. (B.)
  4. Voyez la lettre 4398.