Correspondance de Voltaire/1760/Lettre 4286

Correspondance : année 1760
Garnier (Œuvres complètes de Voltaire, tome 41p. 5-6).

4286. — À M. LE MARQUIS ALBERGATI CAPACELLI[1].
Aux Délices, 3 octobre.

Signor mio amabile, caro protettore di tutte le buone arti, vi ho scritto per mezzo d’un cavalière chiamato M. Hope, mezzo Inglese, mezzo Ollandese, e richissimo, dunque tre volte libero. Egli va a vedere tutta l’Italia et la Grecia ancora.

Ringrazio la sua cortesia per i primi versi della traduzione del Tancredi. Prego il gentile poeta[2] che mi fa l’onore d’abbellirmi di fermarsi un poco, perche la tragedia di Tancredi si rappresenta in Parigi molto différente da quella ch’io vi mandai troppo frettolosamente. Bisogna sempre ripulire le nostre opère,


Et male formatos incudi reddere versus.


Ecco dunque i nostri comici trastulli andati al diavolo col bel tempo. Ilo fatto sempre i vecchio sul mio piccolo teatro, e l’ho rappresentato troppo naturalmente. La mia vecchiezza non mi concede la licenza di venire à Bologna. Venite dunque ad poveras Delicias meas[3].

Adieu, monsieur, je vous respecte, je vous aime de tout mon cœur.

P. S. Ne m’oubliez pas auprès de mon illustre Goldoni, que j’aime plus que jamais.

  1. Éditeurs, de Cayrol et François.
  2. Paradisi.
  3. Traduction : Seigneur très-aimable, protecteur des beaux-arts, je vous ai écrit par l’intermédiaire d’un cavalier nommé M. Hope, demi-Anglais, demi-Hollandais, et richissime, par conséquent trois fois libre. Il va visiter toute l’Italie et la Grèce par-dessus le marché.

    Je rends grâce à votre courtoisie pour les premiers vers de la traduction de Tancrède. Je prie le gentil poète qui me fait l’honneur de m’embellir de s’arrêter un peu, parce que la tragédie de Tancrède qu’on représente à Paris est bien différente de celle que je vous mandai avec trop de hâte. Il est besoin de repolir sans cesse nos œuvres, « et de remettre sur l’enclume les vers mal formés ».


    Voici donc nos amusements comiques qui s’en vont au diable avec le beau temps. J’ai toujours joué le vieillard sur mon petit théâtre, et je l’ai représenté trop au naturel. Ma vieillesse ne me permet pas d’aller à Bologne. Venez donc à nos pauvres Délices.