Correspondance de Voltaire/1759/Lettre 3823

Correspondance de Voltaire/1759
Correspondance : année 1759GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 40 (p. 73-74).

3823. — À MADAME LA PRINCESSE ULRIQUE[1],
reine de suède.
Au château de Tournay, par Genève, 9 avril 1759.

Madame, le roi votre frère m’a ordonné de payer ce triste tribut à la mémoire de Mme la margrave de Baireuth. Je sais qu’il aime Votre Majesté pour le moins autant qu’il aimait celle qu’il regrette aujourd’hui. J’obéis à ses intentions et aux sentiments de mon cœur en mettant aux pieds de Votre Majesté ce faible monument qu’il a voulu que j’élevasse à une sœur qui était digne de vous, et qui était ornée de quelques-unes de vos vertus. Puissent ces vertus, madame, vous procurer sur le trône une félicité qu’on ne trouve guère ni sur le trône ni ailleurs. Je ne vois guère que des calamités dans ce monde. Il me semble qu’il était moins malheureux et moins pervers quand je faisais ma cour à Votre Majesté à Montbijou. Je vis retiré dans un pays tranquille dont les orages n’approchent point. J’y achève ma vie en paix, mais il n’y a point de jour où je ne fasse des vœux pour la prospérité de la vôtre.

Je suis avec le plus profond respect, madame, de Votre Majesté le très-humble et très-obéissant serviteur.


Voltaire, comte de Tournay.

  1. Éditeur, V. Advielle,