Correspondance de Voltaire/1755/Lettre 3038

Correspondance de Voltaire/1755
Correspondance : année 1755GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 38 (p. 485-486).

3038. — À M. DUPONT,
avocat.
Octobre.

Mon cher ami, les maladies découragent à la fin, il y a trois mois que j’ai cessé tout commerce avec le genre humain. Mes amis de Paris ont fait jouer cet Orphelin sans que je m’en sois mêlé. Je serais plus sensible au plaisir de vous revoir que je ne l’ai été à ce petit succès passager. Je comptais aller à Monrion près de Lausanne : je vous aurais envoyé un carrosse sur la route pour vous enlever ; nous aurions philosophé quelque temps avec notre ami M. de Brenles ; mais un homme de Lausanne, à qui j’avais prêté ma maison, s’est avisé d’y tomber malade, et d’y être à la mort six semaines ; il y est encore, tandis que je languis dans mes prétendues Délices.

J’ai ouï dire que des gens de Strasbourg, qui ont été un peu effarouchés d’un certain mémoire, vous ont plus nui que je n’ai pu vous servir. M. de Paulmy, en vous disant que je suis votre ami, vous a fait voir à quoi mon amitié est bonne ; elle est en vérité aussi sincère qu’inutile. Je compte cette inutilité parmi mes plus grands malheurs ; je vis toujours dans l’espérance de vous revoir. Mme Denis vous fait mille compliments, aussi bien qu’à Mme Dupont. Je me joins à elle ; je vous embrasse de tout mon cœur. Voulez-vous bien présenter mes respects à M. et à Mme de klinglin ? V.

Si vous voyez le conseiller[1] de la maison de Linange, je vous supplie de lui recommander de faire honneur à ma lettre de change.

  1. Schœpflin le jeune, qui avait imprimé les Annales de l’Empire.