Correspondance de Voltaire/1755/Lettre 3036

Correspondance de Voltaire/1755
Correspondance : année 1755GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 38 (p. 483-484).

3036. — À M. TRONCHIN, DE LYON[1].
Délices, le 15 octobre 1755.

J’ai lu toutes les discussions sur la guerre. Tout ce que je comprends, c’est que nos plénipotentiaires au congrès d’Utrecht ne connaissaient pas trop l’Acadie, et cela n’arrive que trop souvent. Il faudrait que les autres eussent la bonté de faire graver une carte, Mais les cartes seront toujours embrouillées, et les Français ont la mine de perdre à ce jeu, puisqu’ils jouent avec leur pauvre Canada contre quatre cents lieues d’un très-beau pays. Mais ils ne perdront pas grand’chose. Est-il vrai que les jésuites ont élu un de leurs pères roi du Paraguai, et que ce roi s’appelle Nicolas ? Un damné d’hérétique a fait ces vers à l’honneur de ce nouveau roi :


Du bon Nicolas premier
Le ciel bénisse l’empire,
El qu’il lui daigne octroyer,
Ainsi qu’à son ordre entier,
La couronne du martyre.


Avez-vous entendu parler de cette maudite Pucelle, de saint Denis et de saint Georges ? Tout cela est imprimé, et Dieu sait comment. J’ai vu cette maudite Jeanne. Elle a très-mauvaise façon, mais cela ne m’a pas paru si terrible que je croyais. Je ne veux que protester et rester tranquille. Mauvaise nouvelle de Cadix. C’est pis que Pucelle. On dit cependant que les Anglais ont été huit jours sans prendre de nos vaisseaux. Est-ce possible ?

  1. Revue suisse, 1855, page 402.