Correspondance de Voltaire/1751/Lettre 2170
Mon cher ami, je vous renvoie les nouvelles dont votre amitié m’a fait part. Je ne crois point que ma nièce épouse le marquis de Chimène[1] ; mais tout Paris le dit, et tout peut arriver. Votre correspondant n’est pas d’ailleurs trop bien informé. Il est faux que Grandval joue Caton, il joue César. Il n’est pas plus vrai qu’on ait laissé indécis ce grand procès entre Clairon et Gaussin. Mme de Pompadour et le duc de Fleury ont donné gain de cause à Clairon. Il est vrai que cette grande affaire fait une guerre civile. Peuple heureux, qui n’a d’autre trouble ni d’autre inquiétude ! N’admirez-vous pas l’importance avec laquelle Morand traite à fond ces misères ? Au moins, mon ami, ces amusements valent mieux que de l’ennui, de la neige, une mauvaise santé et des inégalités. J’envoie au roi un exemplaire et demi, cela fait deux avec le premier tome que vous avez. J’espère que ce n’est que pour ses bibliothèques. Je mets des cartons tant que je peux. Il faut passer sa vie à se corriger. Dès que l’ouvrage sera en état, je commencerai assurément par vous.
Je me flatte que je viendrai vous voir lundi ; mais je ne peux répondre d’un quart d’heure dans l’état où je suis.
Voici la copie d’une lettre dont vous pourrez amuser le roi. Il est plaisant qu’on ne veuille pas que je rende justice au prince Eugène. Bonsoir ; je vous embrasse tendrement.
- ↑ Ximenès, dont le nom se prononçait ainsi.