Correspondance de Voltaire/1745/Lettre 1701

Correspondance de Voltaire/1745
Correspondance : année 1745GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 36 (p. 345-346).

1701. — À M. LE COMTE D’ARGENTAL.
À Versailles, le 25 février.

La cour de France ressemble à une ruche d’abeilles, on y bourdonne autour du roi. Il y avait plus de bruit à la première représentation[1] qu’au parterre de la Comédie ; cependant le roi a été très-content. Je ne me suis mêlé que de lui plaire. Sa protection et l’amitié de M. et de Mme d’Argental, voilà l’objet de mes désirs et de mes soins ; le reste m’est très-indifférent, et on peut faire à l’Opéra toutes les sottises qu’on voudra, sans que je m’en mêle. Mon ouvrage est décent, il a plu sans être flatteur. Le roi m’en sait gré. Les Mirepoix ne peuvent me nuire. Que me faut-il de plus ? Il y aurait cent tracasseries à essuyer si je voulais empêcher qu’on rejouât l’opéra[2] de Rameau. Je n’en veux aucune, je ne veux que revenir vous faire ma cour ; mais je vous avertis que Mme du Châtelet veut être du voyage. Je suis comme les jésuites, je ne marche point seul. Vous sentez bien que, n’étant qu’un accident, et Mme du Châtelet étant ens per se, je ne peux me séparer d’elle sans être anéanti.

  1. De la Princesse de Navarre.
  2. Dardanus. (K.) — Les paroles de cet opéra sont de La Bruère.