Correspondance de Voltaire/1740/Lettre 1292
Correspondance de Voltaire/1740
1292. — À M. VAN DUREN.
À Bruxelles, le 15 juin.
Je vous envoie aujourd’hui jusqu’au dix-huitième chapitre inclusivement. Je crois que vous me remercierez de vous avoir donné un tel ouvrage. Je vous recommande encore de ne rien épargner, pour que l’impression vous fasse autant d’honneur que le livre en doit faire à son illustre et respectable auteur, quel qu’il soit.
C’est sur la réputation de votre probité[1] et de votre intelligence que je vous ai préféré. Je vous recommande la diligence la plus prompte, et je vous prie de m’envoyer la première feuille imprimée, par la poste. J’attends l’envoi des dix exemplaires de mes Œuvres par la barque, avec un volume du Machiavel d’Ame lot de La Houssaie.
Voltaire.
Je reçois votre billet et le duplicata ; accusez-moi la réception des deux paquets.
- ↑ Voltaire ne conserva pas longtemps sa bonne opinion sur Van Duren (voyez la lettre 1318). Longues années après, il y eut entre eux une entrevue violente. Voici ce que rapporte Colini dans Mon Séjour auprès de Voltaire, page 118 : « Le libraire Van Duren vint un matin (juin 1753) présenter un mémoire pour des livres qu’il avait remis à Voltaire treize ans auparavant. Van Duren ne put lui parler et me laissa le compte. Voltaire le lut, et trouva que la somme demandée était pour des exemplaires de ses propres œuvres ; il en fut outré. Le libraire revint dans l’après-dînée ; mon illustre compagnon de voyage et moi nous nous promenions dans le jardin de l’auberge. À peine aperçoit-il Van Duren qu’il va à lui plus rapidement que l’éclair, lui applique un soufflet, et se retire. C’est la seule fois que j’ai vu Voltaire frapper quelqu’un. »