Correspondance de Voltaire/1736/Lettre 615

Correspondance : année 1736GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 34 (p. 92).
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615. — À M. LE GARDES SCEAUX[1].

Avant la publication du factum, j’aurais donné beaucoup pour prévenir le scandale. J’aurais acheté le silence d’un scélérat. Mais ce silence n’est plus à vendre. La cabale de Jore a inondé le public de son libelle. Jore a bravé la médiation de M. Hérault et l’autorité du ministère. Recevra-t-il à présent le prix de son crime, de son insolence, et du libelle qu’il a vendu publiquement ? Une évocation à M. Hérault, comme commissaire du conseil, ne serait-elle pas juste ? J’ose l’attendre de votre protection. Le public croirait que j’étais en effet débiteur de Jore si je m’accommodais avec lui ; il aurait le fruit de son crime, et moi la honte. Je m’en remets entièrement à vos bontés. Tout le monde me dit que je suis déshonoré si je m’accommode à présent ; si la voix publique le dit, elle a raison, car la chose dépend d’elle[2].

  1. Edition, Léouzon Leduc.
  2. Jore fut débouté de sa demande, et Voltaire condamné en cinq cents livre d’aumônes.