Correspondance de Voltaire/1733/Lettre 315

Correspondance de Voltaire/1733
Correspondance : année 1733GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 33 (p. 329).
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315. – Á M. DE CIDEVILLE.
Ce mardi, 17 mars.

Formont est arrivé, sed sine te ; il a vu Gustave Wasa avant de me voir ; je crois cependant qu′à la longue je lui donnerai plus de satisfaction. Je viens de faire partir par le coche de Rouen, mon cher ami, un petit paquet de toile cirée contenant deux exemplaires du Temple du Goût, ouvrage bien différent de la petite esquisse que je vous envoyai, il y a quelques mois. Je ne vous écris que bien rarement, mon cher Cideville ; mais, si vous saviez à quel point je suis malade, ce qu’il m’en coûte pour écrire, et combien les poëtes tragiques sont paresseux, vous m’excuseriez. Je peux faire une scène de tragédie dans mon lit, parce que cela se fait sans se baisser sur une table, et sans que le corps y ait part ; mais, quand il faut mettre la main à la plume, la seule posture que cela demande me fait mal. Je suis à présent dans l’état du monde le plus cruel ; mais le plaisir d’être aimé de vous me console[1] · · · · · · · · · · · · · · · · · · · · Adieu, mon aimable Cideville ; si j’obéissais à mon cœur, je vous écrirais des volumes ; mais je suis esclave de mon corps, et je finis pour souffrir et pour enrager. Mandez-moi ce qu’est devenue la présidente de Bernières.

J’ai été si malade que je n’ai pu faire encore que quatre actes de ma nouvelle tragédie[2].

  1. Le papier est coupé dans l’original ; il y manque quelques lignes seulement. (Cl.)
  2. Adélaïde du Guesclin.