Correspondance de Voltaire/1720/Lettre 43


Correspondance : année 1720GarnierŒuvres complètes de Voltaire, tome 33 (p. 55-56).
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43. — À M. THIERIOT.

À Richelieu, ce samedi 25… 1720.

Voici une lettre pour M. le duc d’Orléans ; elle est décachetée, afin que M. de Fargès la voie. En voici une autre pour M. de Fargès, que vous aurez la bonté de lui rendre la première. Quand il l’aura lue, vous lui donnerez celle pour le Régent, et le prierez de la cacheter lui-même. Vous lui donnerez ces lettres avec mon poème, quand il sera écrit ; et, comme on ne voit que difficilement M. de Fargès, je vous conseille de lui écrire un petit mot la veille du jour que vous le voudrez voir. Vous lui manderez qu’ayant bien voulu vous charger, en mon absence, de remettre mon poème entre ses mains, vous lui demandez audience pour le lendemain matin, et qu’il fasse dire à sa porte qu’on laisse entrer M. Thieriot. Vous lui recommanderez, quand vous lui parlerez, sur toute chose de ne faire voir mon poème à qui que ce soit, et vous lui ferez entendre combien il m’est de conséquence qu’on n’en tire point de copie. Cela fait, vous aurez la bonté de mettre l’autre copie de mon poëme dans une cassette, et d’en charger La Brie, avec ordre de partir sur-le-champ pour Sully, où je serai dans quatre jours. Écrivez-moi donc à Sully, mon cher enfant, dès que vous aurez reçu ma lettre.

Comptez que je brûle de revenir à Paris, pour m’y acquitter de toutes les obligations que je vous ai dans cette affaire.

Je suis actuellement dans le plus beau château de France. Il n’y a point de prince en Europe qui ait de si belles statues antiques, et en si grand nombre. Tout se ressent ici de la grandeur du cardinal de Richelieu. La ville est bâtie comme la Place-Royale. Le château est immense ; mais ce qui m’en plaît davantage, c’est M. le duc de Richelieu, que j’aime avec une tendresse infinie, pas plus que vous cependant. Écrivez-moi vite à Sully des nouvelles de votre santé. Si vous aviez besoin d’argent, j’écris à mon frère de vous en faire donner.