Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 8-9/1959

Louis Conard (Volume 8p. 402-403).

1959. À MADAME ROGER DES GENETTES.
[Croisset, 22 février 1880.].

Vous n’imaginez pas dans quel tourment je suis ! 1o  Le procès de mon disciple Maupassant (Voir le Gaulois d’hier). J’ai écrit une lettre qu’on ne m’a pas donné le temps de corriger et qui est écrite en style de cheval de fiacre. N’importe ! elle est publiée et je rougis de mes fautes de français. 2o  Mulot, le secrétaire de notre comité Bouilhet, est mort cette semaine et ses fonctions retombent sur moi, naturellement ! Et travailler dans tout cela ? Le moyen ? Mon dernier chapitre me demandera quatre ou cinq mois et je ne sais plus quand paraîtra mon roman. Je suis exaspéré. Il me faut un tas de renseignements qui se contre-disent et de livres qu’on ne m’envoie pas. Je serais marié, père de famille, commerçant et député, que les autres ne m’embêteraient pas davantage,

J’ai copié pour Sylvanire trois pièces de vers de Bouilhet qu’elle aurait pu trouver dans ses volumes, mais, me sachant fort occupé, sans doute, elle ne m’a pas remercié. Voilà une attention délicate !

La semaine dernière, j’ai passé un jour à rechercher toutes les lettres de George Sand, à moi écrites (174), pour les envoyer à son fils qui désire les publier dans la correspondance de sa mère.

Quoi encore ? Je corrige le volume des poésies complètes de Bouilhet pour Lemerre.

J’ai lu Nana, que je trouve malgré tout un beau livre, canaille, si l’on veut, mais vrai, et fort, très fort. La fin est épique.

La Vie moderne publie la féerie d’une façon stupide. Quels dessins !