Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 8-9/1788

Louis Conard (Volume 8p. 184-185).

1788. À GUY DE MAUPASSANT.
Croisset [15 janvier 1879].

Tranquillisez-vous, mon cher ami, je serai à Paris à la fin de février (ou au milieu de mars) et resterai jusqu’à la fin de mai. D’abord on ne peut pas vivre toujours dans la solitude, et puis j’ai besoin de la capitale pour mes lectures.

L’histoire de la croix de Zola est pitoyable. Est-ce bête ! Mais qu’est-ce qui n’est pas bête ?

Mon frère, professeur de clinique, a demandé un congé au ministre, il y a déjà longtemps, au mois de septembre, et jusqu’à présent il n’a pas reçu de réponse. Il est malade et se tourmente de ce silence officiel. Pouvez-vous dans les bureaux voir ce qui en est ? ou vous informer près de Bardoux lui-même ? La demande a dû passer par le « canal » du directeur de l’école de Rouen, M. Leudet.

Je continue à faire de la métaphysique, et mon chapitre se dessine. Hier j’ai fini la lecture du Catéchisme de persévérance par l’abbé Gaume. C’est inouï d’imbécillité. Et l’Encyclique du Saint-Père, qu’en dites-vous ?

La fin de mon roman dépassera, comme violence, le fameux article de Zola ; du moins je l’espère ! et on ne me « décorerait pas pour ça ».

Sérieusement, je regrette d’avoir l’étoile. Ce qui me sauve c’est que je ne la porte pas. Axiomes :

Les honneurs déshonorent ;

Le titre dégrade ;

La fonction abrutit.

Écrivez ça sur les murs.

Je vous embrasse.

Votre vieux solide.

Dites à Zola que je regrette bien de n’être pas à la première de l’Assommoir pour assommer ceux qui siffleront.