Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 7/1408

Louis Conard (Volume 7p. 74-75).

1408. À MADAME RÉGNIER.
Croisset, jeudi soir [30 octobre 1873].
Madame et chère Confrère,

En rentrant chez moi, ce matin, après une absence de dix jours, je trouve votre lettre et m’empresse de vous répondre.

Carvalho, que j’ai quitté hier à 11 heures du soir, avait commencé la lecture de votre manuscrit et en paraissait très content. Il m’a promis de le lire avec attention et nous en causerons lorsqu’il viendra ici, dans un petit mois. Je ne doute pas du résultat, qui sera heureux. Mais il faudra, je crois, condenser le tout.

Quant à moi, quant au Sexe faible, ledit Carvalho est refroidi et aime mieux jouer d’abord une autre pièce de votre serviteur (seul !) laquelle pièce n’est pas encore finie, mais peut l’être vers le jour de l’an.

La monarchie, grâces aux dieux, me paraît enfoncée ! Cependant il ne faut pas chanter victoire avant de voir les morts par terre.

À propos des morts, j’apprends à l’instant même que cette nuit, pendant que l’Opéra brûlait, mon pauvre Feydeau a quitté ce monde[1]. Tant mieux pour lui, du reste.


  1. Feydeau mourut dans la nuit du 28 au 29 octobre 1873. (Journal des Goncourt, V. 93.)