Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 6/1347

Louis Conard (Volume 6p. 443-444).

1347. À SA NIÈCE CAROLINE.
Croisset, samedi matin, 2 novembre 1872.

Comment ? je n’ai pas répondu tout de suite à Ernest que j’avais reçu, dimanche matin, une lettre chargée ? Je croyais l’avoir fait ! Présente-lui mes excuses. J’aurai été troublé par la compagnie que j’avais. La mère Heuzey séduisait mes deux jeunes gens, Baudry et d’Osmoy. Croirais-tu que Baudry admire son râtelier qu’il prenait pour ses vraies dents ?

Moi aussi, pauvre Caro, je n’ai pas été gai cette semaine. J’ai même été fort triste. Jamais je n’ai plus senti ma solitude ; et puis je lisais des choses crevantes ; et puis c’était la faute du temps. Si tu ne viens ici qu’à la fin de novembre, j’irai te faire une petite visite en attendant. Quand sera-t-il décidé, le fameux voyage de Pologne ?

Demain je traite. J’aurais l’éluite ou de l’éluite tout au moins. Car je suis forcé d’inviter le général de F***. C’est même pour cela que je vais aller tout à l’heure à Rouen.

Je profiterai de ma course pour voir un autre terrain près de la gare d’Amiens[1]. Toujours les occupations mortuaires ! Je pense démesurément à mon pauvre Théo. Avec qui causer littérature, maintenant ?


  1. Pour le monument de Bouilhet.