Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 6/1052

Louis Conard (Volume 6p. 59-60).

1052. À SA NIÈCE CAROLINE.
Paris, lundi matin. [Août 1869.]

Oui, mon loulou, je trouvais que tu oubliais un peu ton Vieux, ton pauvre ganachon d’oncle qui t’aime tant ! mais je ne t’en voulais pas et ne m’en plaignais pas, n’ayant point l’affection tyrannique. Je t’excusais, d’ailleurs, rejetant tout sur les embarras de ton installation.

Il me tarde de te voir dans ton atelier.

Tu n’imagines pas comme ta grand’mère a été de bonne humeur et en bonne santé, pendant son séjour ici ; on aurait dit qu’elle avait quinze ans de moins, et ce qu’il y a d’étrange, c’est qu’elle était moins sourde. Il ne faut pas qu’elle soit un instant seule, aussi a-t-elle dû s’ennuyer effroyablement dimanche ; mais j’espère que les dames Vasse lui tiennent maintenant compagnie.

Si elle n’avait pas eu peur d’être indiscrète, elle aurait, samedi, poussé jusqu’à Dieppe avec Mlle Ozenne. Mais tu sais qu’il faut toujours l’inviter plutôt trois fois qu’une. Quand tu seras prête à la recevoir et elle à aller chez toi (c’est-à-dire après le départ des dames Vasse et avant la venue de Bonenfant), je crois qu’une invitation venant de la part d’Ernest la toucherait beaucoup. Quant à moi, mon loulou, je m’en vais demain passer une douzaine de jours à Londres, puis j’irai à Nogent, et peut-être chez la Princesse, si toutefois elle n’est pas à Dieppe à ce moment-là. En tout cas, je compte être revenu à Croisset vers le 1er ou le 2 septembre.

Ton vieil oncle.