Correspondance de Gustave Flaubert/Tome 4/0561

Louis Conard (Volume 4p. 229-230).

561. À CHARLES-EDMOND[1].
Croisset, mardi soir [octobre 1857].
Mon cher Ami,

Mon affaire aura (je crois !) pour titre « Salammbô, roman carthaginois » . C’est le nom de la fille d’Hamilcar, fille inventée par votre serviteur.

Mais je ne sais pas quand je vous donnerai le numéro un. Ça ne va pas du tout. Je suis malade, moralement surtout, et si vous voulez me rendre un éminent service, ce serait de ne pas plus parler de ce roman que s’il ne devait pas exister.

Si je le fais, il sera pour vous, puisque je vous l’ai promis. Il y en a un chapitre d’écrit. C’est détestable. Je me suis engagé, j’en ai peur, dans une œuvre impossible… Est-il indispensable que vous l’annonciez ? En ne disant rien, songez, cher ami, que vous m’épargnerez un ridicule, si je renonce à cette œuvre par impossibilité de l’exécuter, ce qui est bien possible.

Voyons, soyez généreux ; ne parlez pas du Flaubert.

En tout cas, je serai à Paris vers le 20 du mois prochain. Attendez jusque-là, je vous en prie. Qui vous talonne ?

À bientôt donc, et croyez-moi, nonobstant mes embêtements, le vôtre qui vous serre la main très fort.


  1. Directeur de la Presse.